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Pavé tok

Les consommations énergétiques dépendent moins du bâti que de la façon d'habiter

Grégoire Noble
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Bigdata DPE consommation énergétique

En croisant des données bancaires anonymisées (issues du Crédit Mutuel) et des données de DPE accessibles (Ademe), il est possible d’obtenir un énorme échantillon de logements afin d’étudier la corrélation entre consommations théoriques et consommations réelles. Une équipe de chercheuses et chercheurs ont exploité ces données pour mieux comprendre l’écart constaté entre ces deux chiffres, parfois très éloignés.

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Les factures énergétiques de 180 000 ménages ont ainsi été scrutées et croisées avec d’autres informations liées aux caractéristiques de leurs logements (140 000 en logement collectif avec chauffage individualisé, et 40 000 en maison individuelle). Ont été exclus les ménages qui se chauffent au bois ou au fioul, les règlements n’étant pas identifiables par des virements bancaires, contrairement à des versements réguliers auprès d’un énergéticien comme EDF ou Engie. L’étude s’est donc focalisée sur les résidences principales, uniquement chauffées à l’électricité ou au gaz. Et les chercheurs ont remarqué que s’il y avait bien une progression de la consommation énergétique selon l’étiquette du DPE, elle est cependant beaucoup plus faible que prévu. « Les consommations de la classe G ne sont supérieures que de 86 % aux consommations des classes A-B, et non pas de 560 % comme le voudrait la théorie », soulignent Gabrielle Fack (université Dauphine) et Ariane Salem (Conseil d’Analyse Économique). Les écarts sont donc nettement resserrés entre les meilleures et les moins bonnes étiquettes DPE. Les consommations seraient sous-évaluées pour les logements A-B (148 kWh/m²/an réels au lieu de 83 kWh/m²/an en théorie). Elles sont en revanche nettement surévaluées pour les passoires énergétiques (environ 280 kWh/m²/an contre 550 attendus).

Un DPE à améliorer, une sobriété à acquérir

Mais cet écart serait-il fonction de la surface des logements ? « Sur les petites surfaces, la progressivité entre A-B et G est similaire », notent les chercheuses. L’écart entre les pires et les meilleures étiquettes du DPE est en effet d’environ +67 %. « Mais cette progressivité s’atténue fortement en augmentant les surfaces au-delà de 80 m² ». L’explication ? Il existe des consommations irréductibles, quelle que soit la taille du logement, notamment pour produire l’eau chaude sanitaire ou pour alimenter l’électroménager. D’autre part, il y aurait un « effet rebond » plus important dans les logements plus grands qui – même s’ils sont performants – nécessitent plus d’énergie pour les chauffer que des petites surfaces. Dans la maison individuelle, cette progressivité est même moins marquée que dans le collectif. « Les consommations croissent finalement peu lorsque le logement est peu performant », soulignent Gabrielle Fack et Ariane Salem.
Mais alors, quelles sont les raisons de cet écart entre la théorie du DPE et les mesures réelles de consommation ? « Tout d’abord, il y a des erreurs de mesure et de modélisation par le DPE. La méthode 3CL est imparfaite. Elle surestime la performance thermique des matériaux, qui a tendance à se dégrader dans le temps, et il y a une prise en compte linéaire de la surface du logement », expliquent-elles. Or, cette linéarité est fausse. « Ensuite, les ménages ajustent leur confort thermique et les données d’observent pas ce confort ! », ajoutent les chercheuses. Pour elles, l’erreur serait donc due pour 1/3 à l’erreur de modélisation par le DPE et aux 2/3 par le comportement des occupants, qui a donc un effet très fort sur les consommations. Le Conseil d’analyse économique recommande donc deux mesures : tout d’abord, de repenser, encore une fois, la fiabilité du DPE, déjà remanié en 2021. Ensuite, d’accompagner la rénovation des logements par des conseils de sobriété énergétique auprès des ménages. Ceci pour éviter le fameux effet rebond qui amène par exemple à rehausser la température de consigne une fois les travaux réalisés…

Grégoire Noble
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