Image
Pavé tok

Le lin, du sur-mesure pour la construction durable

Grégoire Noble
Image
Partager sur

[Zepros Bâti] Le secteur du bâtiment connaît bien le béton de chanvre. Mais que faire dans les régions septentrionales où cette ressource est peu abondante ? La coopérative L.A. Linière offre une solution : valoriser les « anas » du lin, ce coproduit ligneux, dans un béton de lin aux propriétés tout à fait équivalentes. Julien Gilliot nous en dit plus sur l’initiative Bâtilin.

À Bourbourg (Nord), la culture du lin est importante. La coopérative L.A. Linière – née de la fusion de deux entités créées dans les années 1950 – transforme chaque année 26 000 tonnes de paille, dont 80 % des fibres textiles sont exportées vers la Chine. Mais que faire des « anas », ces particules de bois récupérées au milieu de la fibre et qui représentent 50 % de la plante ? Julien Gilliot, ingénieur produit Bâtilin, nous explique : « Ce coproduit ligneux, qui ressemble à des copeaux de bois, représentent jusqu’à 15 000 tonnes par an pour notre seule coopérative, soit 800 m3 par jour ! Vue la faible densité, c’est très volumineux. Aujourd’hui, les anas servent de litière pour les chevaux ou entrent dans la composition de panneaux agglomérés pour l’ameublement. Mais cette valorisation est faible. Or ce bois a des qualités isolantes et perspirantes. Nous sommes donc allés vers le Codem – centre de compétence sur la construction durable et les écomatériaux – pour formuler un béton de lin ».

Se présentant comme une alternative au béton de chanvre, il est lié à la chaux et apporte une nouvelle valorisation intéressante à un coproduit abondant et peu cher. L’ingénieur poursuit : « Nous travaillons sur deux formulations : des blocs autoporteurs d’isolation, perspirants qui assurent également le déphasage thermique et apportent du confort, utilisables en doublage d’un mur existant et des blocs porteurs, structurels, avec du ciment, pour la construction neuve ». Les premiers, d’une épaisseur de 10 à 30 centimètres, peuvent supporter différentes finitions comme les enduits de chaux, de terre ou de plâtre. « Le mieux est de laisser respirer le mur pour bénéficier des avantages du matériau », nous confie le spécialiste. Les professionnels ne seront pas déboussolés : ces blocs se montent à joints minces comme de la maçonnerie classique. Pour les blocs porteurs, le développement est encore en cours mais il devrait aboutir en 2022.

À la recherche de nouveaux partenaires industriels et prescripteurs

L’initiative Bâtilin se trouve donc à une étape cruciale : le passage de l’expérimentation soutenue par le Codem à l’échelle industrielle. « L’idéal serait de trouver des partenaires qui ont le savoir faire pour parvenir à produire sur site afin d’éviter le transport d’un matériau volumineux mais léger, ce qui aurait un impact carbone. Nous sommes donc en train de former un groupe aux différentes compétences pour proposer un service complet autour de ce produit, y compris avec des bureaux d’étude », s’enthousiasme Julien Gilliot. Un mur pilote a été réalisé pour tester la mise en œuvre des blocs isolants et un accord a été signé avec le bailleur social SIA Habitat l’utilisera pour rénover des maisons de son parc. Quelques milliers de blocs seront nécessaires pour isoler par l’intérieur ces logements. « L’intérêt sera de montrer les capacités du produit et de comparer les résultats grâce à l’instrumentation des chantiers », nous assure-t-il. L.A. Linière prévoit évidemment d’obtenir une ATEx du CSTB puis d’aller chercher des certifications type Acermi pour pouvoir massifier sa production encore confidentielle. « Le prix est compétitif car le produit de base est peu cher. Il doit rester accessible à tous », poursuit l’expert pour qui la ressource dans les Hauts-de-France sera largement disponible, tout comme dans l’autre région du lin, la Normandie. Bâtilin recherche également des chantiers pilotes auprès d’autres bailleurs sociaux ou d’organismes publics afin de travailler avec eux sur de nouveaux projets de mise en œuvre.

G.N.

Données techniques :

Image

Brique isolante BÂTILIN :

  • Dimensions : L 60 cm x H 30 cm x Ep de 10 à 30 cm (selon les projets)
  • Conductivité thermique : 0,07 W/m.K
  • Déphasage thermique : 12 heures pour 20 cm d'épaisseur

Parpaing BÂTILIN :

  • Dimensions : L 50cm x H 20 cm x Ep 20 cm
  • Conductivité thermique : 0,25 W/m.K
Grégoire Noble
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire