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Rénovation énergétique : les « Coups de pouce » ne seraient que des pichenettes

Grégoire Noble
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[Zepros Bâti] Deux chercheurs des Mines ParisTech ont évalué l’impact des offres « Coup de pouce Chauffage » et « Coup de pouce Isolation » sur le rythme de réalisation des travaux et le niveau des économies d’énergies financées par les CEE. Il s’avère que les résultats sont décevants en ayant eu qu’un effet marginal sur les opérations concrétisées. Matthieu Glachant et Victor Kahn pointent un autre effet d’érosion de l’impact du dispositif des Certificats d’économies d’énergie et préconisent une remise à plat des bonifications.

Depuis janvier 2019, le gouvernement a lancé des offres « Coups de pouce » pour le chauffage et l’isolation en bonifiant ces travaux par un avantage en termes de Certificats d’économies d’énergie. Un obligé subventionne ainsi l’installation d’équipements de chauffage performants par l’attribution de 6 fois plus de CEE que l’équivalence énergétique initiale, ou la pose d’isolants de toiture et de planchers par 2 fois plus de CEE. Une mesure destinée à mobiliser davantage les acteurs de la rénovation thermique autour de primes plus élevées accordées aux ménages, permettant d’abaisser la facture et donc, le reste à charge jusqu’à même descendre à des opérations « à 1 € ». Mais cette politique montrerait ses limites selon les travaux de deux chercheurs des Mines ParisTech qui ont évalué l’impact de ces offres sur le rythme des travaux et sur les économies effectivement observées.

Avant l’instauration de ces deux « Coups de pouce » spécifiques à des catégories de travaux, les opérations éligibles représentaient 30 % des économies d’énergie certifiées en 2017 (28 % en isolation et 2 % en chauffage). « Ce pourcentage est passé à 33 % en 2019 », notent Matthieu Glachant et Victor Kahn dans la synthèse de leur étude (soit 28 % en isolation et 5 % en chauffage). « Le Coup de pouce semble donc n’avoir eu qu’un effet marginal sur la massification des opérations ciblées » même si une nette accélération a été constatée pour l’installation de pompes à chaleur. En revanche, comme le soulignent les auteurs, si le pourcentage n’a que peu varié, le volume des travaux a lui fortement augmenté passant de 64 TWhc de CEE en 2017 à plus de 100 TWhc en 2019. Pour les deux experts, les résultats de ces offres sont décevants.

Wrath of Kahn

Elles auraient même un effet pernicieux : « Les coups de pouce ont évidemment conduit à une forte inflation des CEE bonus. Ils représentent en 2019 plus du tiers des CEE engagés, contre le quart en 2017 et 2018. Cela conduit à une érosion significative de l’impact énergétique du dispositif. La façon la plus pertinente d’apprécier son ampleur est de comparer ce niveau avec celui de l’obligation de la 4e période (2018-2021). Cette dernière correspond à un objectif d’économies d’énergie de 530 TWhc en rythme annuel. La production de 176 TWhc de CEE bonus en 2019 signifie que le tiers de cet objectif est justifié par des économies d’énergie fictives. Les bonus ne représentaient que 15 % de l’objectif annuel en 2018 ». Les deux dispositifs « Coups de pouce » sont destinés à disparaître à la fin de 2021, mais d’autres bonifications devraient venir les remplacer. Les chercheurs suggèrent de changer la logique de bonification de certains travaux par une logique de valorisation de la qualité des opérations. « Concrètement, il s’agirait par exemple de bonifier les travaux de rénovation énergétique incluant une assistance à la maîtrise d’ouvrage ou prévoyant un contrôle ex-post de leur impact énergétique. Ou encore de bonifier les travaux réalisés par des professionnels de la rénovation certifiés par des labels sélectifs de qualité », recommandent Matthieu Glachant et Victor Kahn. « Les bonus réorienteraient ainsi les investissements vers les actions à plus fort impact énergétique ».

L’auteur n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’en 2020 déjà, il publiait une étude sur la rentabilité économique des rénovations énergétiques qui démontrait que certaines opérations mettaient jusqu’à 120 ans pour se rembourser grâce aux économies d’énergie engendrées… Les CEE, très sollicités par les pouvoirs publics, ont encore du chemin à parcourir avant de devenir l’outil idéal de la rénovation thermique la plus efficace.

G.N.

Grégoire Noble
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