Quels métiers de la construction recruteront en 2030 ?

Les différentes crises qui affectent le monde économique – Covid, pénuries de matériaux, hausse des prix de l’énergie – forcent une accélération des changements sociétaux. La pression se fait de plus en plus forte pour réindustrialiser la France tout en décarbonant toutes les activités. Afin d’anticiper le marché du travail des années à venir, la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) et l’institution France Stratégie (rattachée à Matignon) ont mené un vaste exercice de prospective s’appuyant sur différents scénarios macroéconomiques et démographiques… Il en ressort qu’environ 1 million d’emplois seront créés dans la décennie 2020-2030 dont 660 000 concerneront les services marchands. Si le médical se taille la part du lion avec 410 000 postes, le secteur du bâtiment et des travaux publics ne démérite pas et pourrait envisager la création de 120 000 emplois dont la moitié de cadres. Ce qui en ferait un des domaines en plus forte expansion avec l’informatique et la manutention.

Ce besoin de cadres du BTP se fera fortement sentir, puisque leur nombre augmentera de 30 % entre 2020 et 2030. Parmi les « Dix métiers les plus dynamiques pour les diplômés du supérieur », figurent ces ingénieurs du BTP, aux côtés de cadres technico-commerciaux et de cadres administratifs ou financiers. La part de diplômés de l’enseignement supérieur dans l’effectif atteindra les 86 % pour les carrières de l’encadrement du bâtiment et des travaux publics. Mais d’autres métiers disposeront de nombreux postes à pourvoir dans un avenir proche, nécessitant moins d’années d’études. Notamment les conducteurs de véhicules et les techniciens de maintenance.

La Dares note que des déséquilibres potentiels et des difficultés de recrutement existent pour de nombreux postes : « Pour combler ces déséquilibres il s’agira de renforcer l’attractivité de ces métiers pour les jeunes, mais aussi pour les professionnels déjà en emploi en facilitant les transitions, la formation des chômeurs et en favorisant l’entrée sur le marché du travail des inactifs ». Ce sera notamment le cas des conducteurs d’engins du BTP, dont l’attractivité est jugée faible. Des difficultés à trouver de la main d’œuvre qualifiée seront également constatées dans certains métiers nécessitant des compétences techniques spécifiques, qui ne s’acquièrent que par le biais de formations professionnelles initiales ou continues.

Des emplois spécifiques pourraient connaître un fort déséquilibre entre jeunes débutants et départs en fin de carrière : les ouvriers qualifiés du second œuvre du bâtiment notamment pourrait se trouver en déficit de 70 000 postes sur la décennie. La Dares analyse : « Ces métiers de seconde partie de carrière cumulent des départs en fin de carrière nombreux et de faibles arrivées de débutants. Ils ont par le passé attiré de nombreux professionnels venant d’autres métiers parce qu’ils requièrent de l’expérience ». Une situation qui entraînera un manque de main d’œuvre, aggravant des tensions existant déjà actuellement. Pour les métiers qui auront également du mal à attirer, les ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment présenteront « des difficultés de recrutement quasi certaines ». Et si d’aventure un scénario « Bas carbone » devait être adopté par la France, avec un surcroît annuel d’investissement de l’ordre d’un point de PIB, alors 120 000 emplois supplémentaires pourraient être même créés dans la construction (par rapport au scénario de référence développé ici)… Mais où trouvera-t-on alors tous ces bras et ces cerveaux ?