En France, Van Marcke veut (r)ouvrir les vannes
Tout en annonçant avoir repris la marketplace lyonnaise Warmango positionnée sur les métiers du second œuvre technique, le distributeur belge spécialisé, lui, en sanitaire-chauffage a dévoilé la semaine dernière quelques éléments de son plan stratégique baptisé “France up 2025”. Dans son viseur ? Atteindre, a priori, la barre des 120 M€ de ventes dans l’Hexagone d’ici trois ans… contre 40 M€ en 2020.
À l’image du cycliste flamand Sep Vanmarcke, le groupe familial de Courtrai (Flandre-Occidentale) va-t-il revenir dans la course du Tour de France ? En tout cas, il entend bien changer de braquet et avoir le coup de jarret pour se relancer dans l’Hexagone. Arrivée en région lilloise courant 1988, l’enseigne indépendante belge de sanitaire-chauffage aura grandi au gré des ouvertures, mais aussi des fermetures d’agences Van Marcke Technics – le format de comptoir et de libre-service du distributeur.
Entre fin 1993 et l’automne 2017, plus d’une dizaine de points de vente auront dû baisser les rideaux, essentiellement dans le Grand-Est. À l’époque, la direction de Van Marcke France confiait à la rédaction de Zepros Négoce la volonté de la maison-mère flamande de recentrer son maillage commercial dans le nord de la France. Son ambition ? « Mieux développer la proximité clients » et « renforcer encore la mission de stockiste-logisticien » du réseau.
Préalables logistiques
Depuis la SAS Van Marcke, société de droit français, avait pourtant bel et bien le compteur bloqué. Avec un parc de dix-sept points de vente dont un unique showroom Van Marcke Inspirations, contre une vingtaine outre-Quiévrain. Plutôt discrète sur ses projets dans l'Hexagone, l’enseigne a assez peu fait parler d’elle au cours des cinq dernières années ; occupée entre autres à poursuivre la rénovation de ses agences, mais – surtout ! – à redimensionner sa supply chain de fonds en comble.
À Courtrai, l'ETI a engagé au cours l’été 2016 les travaux de “son” chantier logistique : près de 90 000 m² couverts d’un seul tenant qui regroupent désormais les 18 bâtiments éparpillés sur plusieurs sites et souvent vieux de plus de quarante ans. Pour éviter l’out-sourcing et garder le contrôle de sa logistique, le groupe non coté en bourse aura injecté environ 75 M€ pour transférer de 5 km ce nouveau centre de distribution HQE et baptisé l’EDC (pour “Excellent distribution to customers”).
Cet investissement lourd garantirait, aujourd’hui, un traitement automatique des commandes à 80 % (environ 31 000 références stockées). Et « grâce à un robot palettiseur appelé Gloria, on atteint une performance de picking de 99,99 % pour les produits en stock », se félicitait il y a trois ans la direction de Van Marcke au quotidien wallon Le Soir.
À l’époque, la PDG du groupe éponyme, Caroline Van Marcke, soulignait l’urgence de gagner en productivité pour optimiser le taux de service face à certains de ses concurrents belges, mais aussi aux pure players (Amazon, Alibaba, ManoMano et Reuter entre autres). Aujourd’hui, l’EDC a peut-être aussi une autre vertu : tenter de gonfler les stocks de sécurité face à la flambée des prix des matériaux de construction et des équipements techniques.
« Maintenant, nous sommes prêts pour l’avenir. Le nouveau centre de distribution était important non seulement pour mettre à niveau notre logistique, mais aussi comme tremplin pour préparer l’ensemble du groupe à l’expansion, principalement en France. »
Caroline Van Marcke, PDG du groupe Van Marcke
Trois leviers pour une « priorité » : la France
À la tête de l’entreprise depuis vingt ans, Caroline Van Marcke n’a jamais caché ses ambitions sur le marché français. En juin 2019, elle confiait au quotidien bruxellois Libre Éco que « la France est un pôle de croissance important. Nous sommes actuellement uniquement dans les Hauts-de-France car nous n’avions pas la logistique pour couvrir correctement les autres régions. Grâce à notre nouveau centre de distribution, situé à huit kilomètres de la frontière française, nous allons pouvoir nous étendre ».
Fin avril 2019, quelques jours avant l’inauguration de l'EDC, celle que ses salariés appellent volontiers « Madame Caroline » revendiquait déjà auprès du quotidien belge De Tijd avoir gagné « une part de marché supplémentaire » en Belgique grâce à une approche logistique réformée.
Après avoir « mis à niveau » la supply chain et accéléré sa transformation digitale (investissements dans les SI, la data, création d’applis, simulateurs 3D…), l’entreprise fondée en 1929 estime dorénavant disposer d’« un tremplin pour préparer l’ensemble du groupe à l’expansion, principalement en France » assure la dirigeante qui fut présidente de la FEST de 2016 à 2018. Le 17 mars dernier, son groupe a envoyé un premier signal aux acteurs du marché français avec le rachat de Warmango : une marketplace BtoB qu’il considère aujourd’hui comme « une pépite ».
Dans le cadre de son plan stratégique “France up 2025”, Van Marcke souhaite « multiplier par 3 le chiffre d’affaires français en 3 ans grâce à 3 leviers. »
Modèle hybride entre la place de marché BtoB et la coopérative d'achat d’artisans, la start-up fondée à l’automne 2015 avait procédé à quatre levées de fonds successives. Sur son exercice comptable 2019-2020 (clos au 30/09/2020), Warmango a annoncé un chiffre d’affaires de 793,51 k€ pour une perte de 766,21 k€. Sur 2018-2019, le chiffre d'affaires déclaré était de 99,82 k€ (source : Infogreffe). Alors que ses cofondateurs annoncent une croissance « exponentielle » des ventes l’an passé (de… +202 % à environ 2,5 M€), leur visée 2022 serait de 12 à 15 M€ de chiffre d’affaires.
Un sérieux coup de pouce pour l’enseigne à l’hippocampe en France qui, aujourd’hui, souhaite se développer « rapidement ». En 2020, les seize points de vente et le showroom Van Marcke Inspirations basé à Marcq-en-Barœul, près de Lille, ont affiché 40,38 M€ de chiffre d’affaires pour 576,8 k€ de résultat vs 42,4 M€ en 2019 pour une perte de 788,6 k€ (source : Infogreffe).
Les implantations de Van Marcke en France
• Dans le Nord : Cambrai, Douai, Dunkerque, Lesquin, Lomme, Marcq-en-Barœul (siège social + 1 agence Van Marcke Technics + 1 showroom Van Marcke Inspirations), Maubeuge, Roubaix, Tourcoing et Valenciennes
• Dans le Pas-de-Calais : Arras, Béthune, Boulogne-sur-Mer, Lens et Saint-Omer
• Dans la Somme : Amiens
Bientôt des boutiques Sawiday en France ?
Dans un communiqué publié en fin de semaine dernière, la maison-mère belge dévoilait deux autres leviers figurant sur sa feuille de route “France up 2025”. D’une part, « l’ouverture à la franchise » de Van Marcke dont le « déploiement national » était jusqu’ici « “confinée” dans le nord de la France ».
D’autre part, la montée en puissance de son site marchand BtoC Sawiday positionnée sur l’aménagement de la maison et, en particulier, sur l’univers de la salle de bains. Depuis l’automne 2020, Sawiday est devenue en Belgique la marque ombrelle des enseignes Sanitair Winkel et Magasin Salle de Bains. Créé aux Pays-Bas en 2009, le concept grand public Sanitair Winkel (ex-Rorix) dispose d’un réseau de neuf showrooms d’environ 1 000 m² chacun. Courant 2020, Van Marcke a pris une participation dans le capital de cette société indépendante alors rebaptisée Sawiday pour moderniser son image auprès des particuliers.
Dans un bref entretien accordé en 2019 à Twinkle, un magazine hollandais dédié au commerce en ligne, Jeroen Heijsen, directeur marketing de Sanitair Winkel aux Pays-Bas, évoquait alors le souhait de « s’implanter physiquement sur le long terme en France » où seule une boutique en ligne est opérationnelle pour le moment.
Selon lui, ce serait « un premier pas et il n’est certainement pas exclu de regarder aussi en Allemagne et peut-être vers les pays scandinaves ». En attendant, le hub logistique de Van Marcke à Courtrai va assurer la logistique du Sawiday.fr. Enregistrée en novembre dernier au greffe du tribunal de commerce de Lille, la filiale Sawiday France est hébergée au siège social de Van Marcke France. Un coup de pédale supplémentaire pour le redéploiement de Van Marcke dans l’Hexagone ?
Van Marcke : son stop-and-go sur le marché français
• 1988 : première implantation de l’enseigne belge Van Marcke en France, à Lomme (au sud de Lille) ; développement dans les départements du Nord, du Pas-de-Calais et dans l’Aisne
• 1998-1999 : ouverture de 2 agences en région parisienne (Bobigny et Montreuil, en Seine-Saint-Denis). Fermeture courant 2000
• 2006-2009 : nouvelle phase de développement dans l’est de la France avec l’ouverture de 6 agences (par ordre chronologique : Metz, Nancy, 2 sites sur Strasbourg, Mulhouse et Belfort)
• 2010 : fermeture de 3 points de vente dans l’Est
• 2011 : arrêt de l’activité dans l’Est
• Juillet 2013 : ouverture de la salle d’exposition Van Marcke Inspirations à Marcq-en-Barœul (59)
• Juillet 2016 : début des travaux de la nouvelle plateforme logistique du groupe à Courtrai (Belgique)
• 17 mars 2022 : annonce du rachat de Warmango et du plan “France up 2025”
(Source : Groupe Van Marcke)
Le groupe Van Marcke en bref
• Entreprise fondée en 1929 par Raymond Van Marcke à Courtrai
• Implanté en Belgique (avec 83 comptoirs Van Marcke Technics, 20 showrooms Van Marcke Inspirations, 8 centres Big Blue Points), au Grand-Duché du Luxembourg (5 comptoirs et 2 showrooms à la suite du rachat du grossiste indépendant Comptoir des Fers & Métaux en 2013), en Suisse (1 LS), aux États-Unis (26 sites Van Marcke Plumbing Supply)
• Pôle industriel : Labonorm NV (fabrication de mobilier en bois pour les laboratoires - 1,8M€ investis en 2016 pour déployer le concept d'industrie 4.0) et Intersan (production d'équipements sanitaires pour les marchés non résidentiels : gammes commercialisées dans les réseaux Van Marcke et Sawiday)
• Filiale financière Izola Bank basée à Malte et destinée entre autres à ouvrir des lignes de crédit client
• 511 M€ HT de CA en 2020 vs 483 M€ en 2018
• 1 505 salariés dont 1 180 en Belgique et 83 en France (au 31/12/2020)
(Source : Van Marcke)