Négoce chauffage-sanitaire : 2020 chaotique, 2021 fantastique (peut-être)
La Fnas a dévoilé début juin les résultats de son étude pilotée chaque année par l’ONTSBTP sur les achats des grossistes sanitaire-chauffage en 2020. Une année qualifiée « d’inédite et chaotique » par Philippe de Beco, président de la fédération pour introduire la présentation. Passage en revue des différents marchés...
Comment analyser les résultats de l'année 2020, marquée par la rupture de la crise sanitaire, avec des impacts différents selon les marchés ? Finalement, les résultats de ces douze derniers mois dessinent une courbe plus homogène que celle des 12 mois 2020. Un constat particulièrement vrai sur le sanitaire, plus pénalisé par la crise du Covid-19 en raison de la fermeture de plusieurs semaines des salles d’exposition. Le chauffage, lui, a profité de la réactivité des grossistes très tôt réouverts en mode dégradé ou en click & collect et qui ont de plus profité des "Coups de Pouce Chauffage" et du succès de Ma PrimeRenov’.
Au global le marché total des achats de la distribution spécialisée professionnelle a baissé de 3,4% pour atteindre 4 Md€ : 2,27 Md€ pour le chauffage, 1,19 Md€ pour le sanitaire et 0.62 Md€ pour la plomberie.
Des souffles contraires sur la thermique
Dans le détail, sur le marché de la thermique, les achats des grossistes ont connu une croissance de 0,3 %, toutefois selon les familles de produits, les chiffres divergent fortement. « Les écarts peuvent atteindre 35 points et l’écart à la moyenne est de l’ordre de 15 points », précise Philippe Dresto, directeur de l’ONTSBTP. Pascal Chirat, président de la branche thermique de la Fnas, dresse les perspectives des différents segments de marché pour 2021. Sans surprise, sur le moyen terme, les ventes de chaudières sont plutôt baissières, d’une part sous le coup de la future RE2020 et l’anticipation de la fin des chaudières gaz dans le neuf (estimé à une perte d’environ 100 000 générateurs/an) ; d’autre part sous l’effet de la suppression anticipée des opérations coups de pouce. En revanche, pour les PAC, l’avenir s’annonce dégagé : sur les PAC air/eau, « la croissance soutenue va se poursuivre dans le cadre des opérations aidées (MaPrimeRenov’ et CEE) », pronostique Pascal Chirat évaluant le marché autour des 200 000 appareils en 2021 ; les Pac air/air seraient elles en voie de stabilisation aux alentours de 780 000 appareils en 2021. Enfin, sur la Biomasse, là aussi le marché de la rénovation est favorable et les espoirs demeurent pour un développement dans le neuf du solaire en collectif.
La salle de bains : coup de frein puis forte reprise
Principale victime de la crise sanitaire, les composants de la salle de bains ont subi une baisse des achats de 6,3% (ils étaient à +4% en 2019). Par segment de marché, là aussi, des écarts apparaissent. Les achats en robinetterie reculent de 5,5 % à peu près comme les ventes à -5,2 % ; A l’inverse, les meubles de salle de bains progressent de 1,3 % chez les négoces, alors que le marché (AFISB), perd 9,9 %. Michel Cattet, pour la branche Sanitaire de la Fnas, y voit les résultats d’une prise de parts de marché sur la GSB et internet. Parmi les baisses inattendues, figurent celle des receveurs, tout comme celles des baignoires nues et des bâti-supports. En revanche, le négoce résiste sur les cabines, parois de douche et pares bains : certes le CA est en baisse (-5,4%) mais moins que celui du marché des industriels (- 10,2 %) », note l’étude. Et pour 2021, quelles seront les orientations ? Positives, si l’on s’appuie sur la tendance conjoncturelle à fin avril 2021 : une progression annuelle sur 12 mois glissants de +15,5 % ; et de +43,2% en cumul exercice depuis le début d’année. De plus, ce marché pourrait prochainement bénéficier de nouveaux leviers de développement. En tous cas, la Fnas mise fortement sur le déploiement de mesures inspirées du récent rapport Broussy intitulé "Nous vieillirons ensemble". Parmi les propositions, ce rapport préconise la création d'un dispositif MaPrimAdapt basé sur le principe de MaPrimeRénov’ qui permettrait de simplifier et massifier les aides à l'adaptation du logement en les regroupant sur un guichet unique, d'un dossier unique, de conditions d'éligibilité uniques et d'un fonds de financement unique. « L'objectif fixé serait de 100 à 150 000 adaptations par an pour un budget de 500 millions d'euros, alors que la contribution annuelle actuelle des différentes institutions s'élève à 152 millions, soit 3 fois plus ! » note la Fnas.
La plomberie à -9,9% en 2020
Enfin sur la plomberie, l’évolution négative des achats du négoce à - 9,9 % se situe 3 points au-dessous de la moyenne du marché. Du côté du chiffre d’affaires, les grossistes sont également en recul, à -2,1%. Pour l’ONTSPBTP, cette situation s’explique par un phénomène de déstockage en lien avec la conjoncture sanitaire et le manque de confiance dans les marchés. A noté tout de même la belle performance de l’outillage électroportatif qui augmente de 0,8 % en structurel et de 3,2 % par rapport à 2019.
En conclusion de ce tour d’horizon 2020, Philippe Dresto voit dans cette baisse du marché, un « accident conjoncturel » lié à la crise sanitaire et mise donc sur la reprise de la dynamique de 2019. Philippe de Beco estime également que 2021 s’annonce comme une très bonne année aux vues des premiers mois. Toutefois, il apporte quelques bémols à cet enthousiasme : les nouvelles réglementations, REP (déchets), RE2020, loi Climat& Résilience qui tout en emmenant la filière Bâtiment dans la bonne direction pourrait tout de même ralentir la machine. Également pointées comme freins potentiels : les pénuries de matières premières et variations des prix. Pour le président, le négoce doit poursuivre ses efforts et sa mutation sur le digital, la logistique, le transport, se renforcer encore dans son rôle d’expert et de conseil, et enfin, relever le défi majeur de la formation. Un sujet qui lui donne l’occasion de réaffirmer l’importance de mener à terme, en 2021, le projet bien enclenché de rapprochement avec la FDME. (Marie-Laure Barriera)