Image
Pavé tok

Le Pôle Fibres Energivie prône l'isolation globale et performante dans un nouveau livre blanc

Marc Wast
Image
Energivie Livre blanc 2023

Alors que MaPrimeRénov’ flèche majoritairement ses aides vers les équipements techniques (70 % des subventions sont affectées au chauffage contre 21 % pour l’isolation), les travaux d’isolation reviennent sous les feux de la rampe grâce à des actions de communication combinées de la part des organisations professionnelles et des industriels du secteur. Dernière initiative en date, la parution du 2e livre blanc du Pôle fibres Énergivie et Build & Connect qui fait suite à la première édition sortie en 2018.

Partager sur

Pour cet opus 2023, le Groupe de Travail sur la qualité de l’enveloppe du bâtiment (GTQE) dévoile, sur 40 pages, les nouveaux enjeux, qu’il s’agisse autant de construction neuve que de rénovation. Une mise à jour où l’on constate que des points d’amélioration perdurent toujours, notamment en ce qui concerne les performances énergétiques réelles par rapport aux chiffres théoriques, tant au niveau de l’enveloppe du bâtiment que des équipements techniques. Le GTQE milite ainsi activement pour introduire une garantie de résultats grâce au commissionnement, se traduisant par une vérification systématique et complète de la performance thermique du chantier réalisé (enveloppe et équipements). Un sujet qui revêt toute son importance face à l’enjeu lié à la massification à mener pour la rénovation du parc de bâtiments existant.

« Durant ces derniers mois, nous avons mené des études afin de mesurer les éventuelles divergences entre les performances énergétiques simulées lors des phases de conception et les performances réelles. Cet exercice a mis en lumière des écarts importants entre les performances estimées en amont par la simulation et les résultats réels en exploitation. Ceci est notamment observé pour les besoins de chauffage de logements collectifs qui peuvent être jusqu’à deux fois plus mauvaises que celles obtenues lors des simulations », explique David Corgier, membre du Groupe de Travail.

Entre 5 et 7 millions de logements sont considérés comme des passoires thermiques et 25 % des Français disent avoir des difficultés à payer leur facture de chauffage.

Détérioration de la QAI

En France, l’Anses estime entre 14 et 20 % le nombre de logements présentant des moisissures visibles. Un constat partagé par l’OMS qui confirme que « les problèmes liés à la qualité de l’air intérieur (QAI) des bâtiments sont reconnus comme un important facteur de risque pour la santé humaine ». D’ailleurs, toujours selon l’OMS, « les ponts thermiques, une isolation inadéquate (…) peuvent créer une température de surface inférieure au point de rosée de l’air et produire de l’humidité », engendrant le développement de moisissures.

Pour Raphaël Kieffer, autre membre du Groupe de travail et DG de Schöck France, « malgré la mobilisation de nombreux acteurs du secteur, la nouvelle réglementation souffre d’une stagnation des niveaux d’exigences sur les ponts thermiques. Cela signifie qu’elle permet de continuer à construire des bâtiments isolés par l’extérieur en négligeant de traiter la plus grosse déperdition énergétique qui est celle au droit des balcons/loggias et acrotères. En isolation thermique par l’intérieur, l’objectif de moyens doit être transformé en objectif de résultat au droit des ponts thermiques, et imposer une réduction de la valeur psi de 0,6 W/ml-°K à 0,4 W/ml-°K ».

Image
Energivie Livre blanc Intervenants

Investir dans une rénovation durable

Conséquence directe, les habitations présentant un déficit flagrant en termes d’isolation et d’étanchéité (DPE F et G) se négocient jusqu’à 57 % moins chères que les biens identiques affichant une étiquette énergétique A. Le retour sur investissement en cas de rénovation énergétique performante est toujours avantageux puisque le Cerema a constaté une plus-value d’environ 15 % lors de la revente d’un bien après travaux. Néanmoins, ces rénovations doivent être réalisées par des entreprises parfaitement formées et contrôlées régulièrement jusqu’à achèvement. Ce suivi rigoureux doit devenir un standard pour que les performances soient pérennes, et les retours d’expériences réussis serviront d’exemple pour permettre une massification indispensable à la réalisation des objectifs d’ici 2050. Pour cela, la mobilisation de toutes les forces et moyens disponibles est requise. Pour éradiquer toutes les passoires thermiques d’ici 2034 (voir encadré), le coût total est estimé à 70 Md€ pour obtenir une étiquette D et 130 Md€ pour atteindre le niveau BBC. Un montant conséquent, sans aucun doute, mais à relativiser quand on sait que l’on pourrait déjà économiser chaque année environ 10 Md€ sur le budget de l'État liés aux frais de santé occasionnés par les logements dégradés voire insalubres, sans parler de la réduction de la facture énergétique loin d'être négligeable.

« Des mesures structurelles fortes sont plus que jamais attendues. Malheureusement, les dernières tentatives législatives et règlementaires n’ont pas permis d’enclencher une véritable dynamique. Si la loi Climat et Résilience et la Réglementation environnementale 2020 ont marqué des avancées, les mesures adoptées demeurent insuffisantes pour endiguer la crise climatique, énergétique et sociale. Aujourd’hui, 86 % des travaux engagés ne concernent que de simples gestes de rénovation et ne sont pas encadrés par une méthodologie compatible avec la performance finale recherchée », conclut Philippe Boussemart, membre du Groupe de travail et directeur général de Sto France.

Les 3 grandes mesures préconisées par Energivie

Action n°1 * Adopter un plan choc d’éradication définitive des passoires thermiques avant 2034.
- Atteindre 500 000 rénovations globales et performantes par an.
- Stopper le saupoudrage des aides et les concentrer sur ce plan pour bénéficier d’un retour sur investissement significatif.
- Mettre en place des zones expérimentales prioritaires (ZEP) à partir de 2023 pour valider la performance énergétique et économique en y associant l’État, les collectivités, les bailleurs, les maîtres d’œuvre, les opérateurs de rénovation énergétique.

Action n°2 * Créer une Prime Travaux Combinés (PTC) instaurant les étapes et l’ordre à respecter, pour atteindre le niveau de performance BBC en résidentiel privé (individuel et/ou collectif).
- Respect de la programmation des travaux (Isolation murs, combles et ventilation, parois vitrées, chauffage-ECS avec EnR)
- Mise en œuvre des travaux en 3 à 4 étapes sur une durée maximale de 10 ans.
- Prime "PTC" progressive au fil des travaux et proportionnelle en fonction des revenus des ménages.
- Soutien de "Mon Accompagnateur Rénov’" pour assurer le suivi et le des travaux jusqu’à la livraison.

Action n°3 * Rendre la construction neuve compatible avec la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).
- Renforcer les exigences de l’indicateur Bbio de 10% à chaque étape de la RE 2020 (2025, 2028 et 2031) pour éviter une stagnation de la performance des bâtiments neufs.
- Renforcer le traitement des ponts thermiques et en faire un objectif de résultat : abaisser le psi de 0,6W/ml-°K à 0,4 W/ml-°K sans attendre
- Faire évoluer les méthodes de calcul théoriques (RE2020, RT-EX, DPE...) une obligation au plus proche de la réalité des consommations afin de mieux orienter les choix vers la sobriété en chauffage.
- Imposer le commissionnement sur la qualité de l’enveloppe dans la réglementation des bâtiments neufs.
- Réinstaurer un label pour permettre la mise en œuvre progressive de ces actions et préfigurer la réglementation post-RE2020.

Marc Wast
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire