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La soutenable légèreté du hêtre

Grégoire Noble
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[Zepros Bâti] Le hêtre, 2e essence feuillue la plus répandue en France, est d’ordinaire utilisé en menuiserie et mobilier. Mais Manubois (groupe Lefebvre) a décidé de mettre en valeur ses qualités de dureté et de résistance pour en faire un bois de structure, sous forme de lamellé-collé (BLC). La démarche a convaincu Bouygues Bâtiment qui va construire un R+7 de bureaux à Rouen faisant appel à ce nouveau matériau.

L’emploi du hêtre, en lamellé-collé, est maîtrisée chez Manubois depuis des années. Mais, comme l’explique Mathieu Peltier, le directeur d’exploitation : « On trouvait dommage de limiter son utilisation aux seules menuiseries et mobilier, d’autant que ce matériau est très présent en France. On en trouve par exemple très facilement dans nos forêts, situées à moins de 50 km de notre siège (en Normandie, NldR) ». En effet, le hêtre est le 2e arbre feuillu le plus répandu sur notre territoire après le chêne, et son bois présente des caractéristiques intéressantes : résistance, dureté, facilité de mise en œuvre et esthétique. Il y a 10 ans, l’institut technologique FCBA initiait donc une étude sur l’utilisation de cette essence en construction, qui allait démontrer que « le hêtre serait efficace et performant pour les structures de bâtiment, en substitution du métal ou du béton ». Avec l’arrivée prochaine de la RE2020 qui fait la part belle aux matériaux biosourcés qui stockent le carbone, la montée en puissance de la filière est donc attendue.

Pour parvenir à développer un produit spécifique à un usage en structure, Manubois a donc mis au point une nouvelle machine permettant de découper le bois à plus grande échelle, pour confectionner des poteaux et poutres, et sélectionné une colle plus puissante. Le bois lamellé-collé de hêtre ainsi obtenu répond à tous les tests de flexion, compression et résistance qui lui sont imposés. Le nouveau produit a reçu une certification individuelle du CTB attestant de ses performances et de ses qualités, souvent supérieures à celles des résineux. La société normande, filiale du groupe Lefebvre, annonce que la commercialisation vient de démarrer, progressivement, avant une introduction à plus grande échelle dans les 2 ans qui viennent. Un délai que n’attendront pas Bouygues Bâtiment Grand Ouest et le promoteur Linkcity qui prévoient d’utiliser le lamellé-collé de hêtre dans un de leurs projets, dès l’été 2021.

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La fin des haricots pour les résineux

Dans le quartier « L’éveil de Flaubert » à Rouen, un premier bâtiment tertiaire R+7 sortira bientôt de terre. Il s’appuiera sur 70 poteaux – soit 36 m3 de hêtre – en support des planchers en béton. Conséquence : l’immeuble présentera une empreinte environnementale réduite et atteindra le niveau Bepos Effinergie 2017, ainsi que l’équivalent du niveau E3 de l’expérimentation E+C-. Il visera également le label Bâtiment Bas Carbone (BBCA) et la certification Breeam Very Good. Fabrice Denis, le directeur Stratégie Construction Bois de Bouygues Bâtiment France, résume : « Notre stratégie est pragmatique : mettre du bois partout où l’on peut, en capitalisant sur un pôle d’excellence, les atouts innovants des solutions bois, la formation et un club des partenaires ». La filiale du groupe de BTP prévoit de réaliser 30 % de toutes ses constructions en bois d’ici à la fin de la décennie. Elle rappelle dans son communiqué que ce matériau renouvelable et recyclable, stocke environ 850 kg de CO2 par mètre cube.

Dans le cas du chantier rouennais, Manubois s’approvisionnera essentiellement dans les forêts de Seine-Maritime, en exploitant des ressources dans un rayon de 50 km. « Avec cette solution dédiée à la construction, nous utilisons des bois aujourd’hui peu ou mal valorisés, parce qu’ils comportent des nœuds par exemple. [Nous] contribuons ainsi à la bonne gestion des forêts », ajoute Maxime Castel, prescripteur chez Manubois. La société précise que le BLC de hêtre se distingue, outre par son esthétique très homogène et sa teinte claire, par une résistance élevée qui permet d’obtenir des sections plus fines et libère de l’espace dans les bâtiments. « Cette finesse génère des économies de matière qui, ajoutées à un bilan carbone réduit, compensent le surcoût de la transformation par rapport à celle des essences résineuses », assure l'entreprise. Ca sent le sapin pour le Douglas !

G.N.

Grégoire Noble
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