Les professionnels soulagés de la reconduite de MaPrimeRénov'
Un décret de dernière minute a permis de reconduire le dispositif MaPrimeRénov' pour l’année 2025. Une décision qui satisfait les acteurs du secteur du Bâtiment, qui pointent toutefois qu'elle ne garantit qu'une stabilité temporaire.
Dans un contexte politique sous tension, marqué par la censure du gouvernement Barnier, MaPrimeRénov' a été reconduite in extremis pour une durée d'un an le 5 décembre dernier. Ce décret, signé à la dernière minute, prolonge les règles actuelles, notamment le maintien des aides pour les travaux "mono-gestes" tels que l’isolation de toitures ou le remplacement de fenêtres. Une décision qui met fin, pour le moment, aux craintes liées à une réforme plus radicale du dispositif.
Pour Philippe Bernard, porte-parole de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), « cette reconduction est une bouffée d’air. Les entreprises artisanales avaient besoin de visibilité pour planifier leurs activités. » Audrey Zermati, directrice stratégie d'Effy enfonce le clou : « Dans ce contexte politique incertain, la publication de ces décrets est une très bonne nouvelle. Ils fixent les règles pour a minima un an et redonnent de fait de la stabilité, de la lisibilité sur les règles du jeu en matière d’aide à la rénovation énergétique. Cette stabilisation est un gage de confiance dont les Français ont besoin pour pouvoir de nouveau se projeter dans leurs travaux de rénovation énergétique. »
Des ajustements qui questionnent l’avenir
Cependant, cette stabilité est accompagnée de restrictions budgétaires significatives. Les subventions pour certains équipements, comme les chauffages au bois ou à la biomasse, seront réduites de 30 %, tandis que les avances pour les ménages modestes passeront de 70 % à 50 %. En outre, le budget total consacré à MaPrimeRénov’ diminue drastiquement, passant de 4 milliards d’euros en 2024 à seulement 2,3 milliards pour 2025.
Ces coupes budgétaires inquiètent. « La baisse des aides alourdit la charge financière pour les ménages les plus modestes et pourrait freiner le rythme des rénovations », estime Terry Tang, directeur général France de Clivet, fournisseur de systèmes CVC.
Une vision politique encore floue
Bien que le dispositif soit reconduit, les professionnels déplorent le manque de visibilité à moyen terme. En effet, cette prolongation ne garantit qu’une année de stabilité, laissant planer des incertitudes sur l’avenir du secteur au-delà de 2025. Et cette reconduite temporaire est perçue comme une réponse plus politique que stratégique. Terry Tang souligne : « Ce qui freine le plus notre industrie, ce n’est pas tant la baisse des subventions, mais l’instabilité politique. Les acteurs économiques ont besoin de règles du jeu claires et durables pour investir et s’organiser. »
À cela s’ajoute la crainte d’un ralentissement de la dynamique de rénovation énergétique en raison de ces incertitudes politiques. Si MaPrimeRénov' a permis de financer 240 000 rénovations en 2024, l’objectif annoncé de 350 000 pour 2025 semble ambitieux, voire irréaliste sans un cadre budgétaire solide. Or, pour assurer le succès de la transition énergétique, il sera indispensable de garantir un dispositif pérenne, qui réponde aux attentes des ménages et des acteurs du Bâtiment.
3 questions à : Terry Tang, directeur général de Clivet France
Si les mesures sont reconduites, on constate cependant quelques changements...
En effet, bien que les règles actuelles soient reconduites, des modifications entreront en vigueur. Par exemple, les subventions pour certains équipements comme les chauffages au bois vont diminuer d’environ 30 %, et l’avance de fonds pour les ménages modestes passera de 70 % à 50 %. Pour autant, ces ajustements, bien que significatifs, ne devraient pas être rédhibitoires pour les ménages. Les professionnels ont les moyens de s’adapter et de continuer à accompagner leurs clients dans leurs projets.
Quelles sont vos principales inquiétudes concernant ce dispositif ?
Ce n’est pas tant la baisse des aides qui nous préoccupe, mais plutôt l’instabilité politique et le manque de visibilité. Par ailleurs, la stabilité salutaire des règles de MaPrimeRénov' en 2025 doit aussi s’accompagner d’une réelle simplification des parcours de travaux en faveur de la massification des rénovations d’ampleur des logements. Car le flou et la complexité des procédures impactent directement la dynamique de la transition énergétique et met en danger la pérennité de nombreuses entreprises.
Qu’attendez-vous maintenant ?
Nous espérons une stabilisation politique et une confirmation rapide du budget pour 2025. Ce serait un signal fort pour le secteur. Mais pour que cet effort collectif réussisse, il faut absolument un cadre clair et durable. Sans cela, la dynamique de la rénovation énergétique risque de s’essouffler, et ce serait une perte pour tout le monde.