« On propose un chemin alternatif ou complémentaire à celui des banques », Hervé Degreve
Vasco est un tout jeune acteur du secteur de la rénovation énergétique. A travers une solution de financement de rupture, la société souhaite accélérer et changer d’échelle pour financer une centaine de rénovations d'ampleur cette année et 3 fois plus en 2025, nous confie, Hervé Degreve, son co-fondateur. Il revient pour Zepros sur la genèse et le fonctionnement du projet.
La rénovation globale est un sujet auquel on croit depuis longtemps mais qui a encore du mal à émerger. Quand il s’agit de financer les quelques dizaines de milliers d’euros de reste à charge, on est souvent face aux mêmes solutions bancaires historiques qui innovent peu ou trop lentement. C’est pour cela que nous avons atterri sur l’idée de changer complètement la donne sur le financement.
Le principe, c’est celui du capital immobilier qui consiste à racheter un bout de la maison en échange de liquidité. Ce concept existe depuis une vingtaine d’années aux Etats-Unis et commence à se développer dans certains pays d’Europe. Et nous on avons décidé de l’appliquer à la thématique de la rénovation énergétique. Par exemple, si l’on prend une maison estimée à 400 000 euros, et que les travaux s’élèvent à 40 000 €, on propose d’échanger ce montant contre une détention du bien qui n’est pas de 10 % mais de 13 %. On va donc détenir 30 % de plus que ce qu’on investit, auxquels s’ajoutent 3 000 € de frais de dossier. Chez le notaire, on va signer l’acte d’achat de ces 13 % ainsi qu’une convention d’indivision d’une durée de 10 ans qui régit les droits et les devoirs de chacun, notamment le fait que l’on cède au client notre droit d’usage et d’habitation. Quant à l’argent, il est déposé sur un compte au nom du client 100% dédié aux travaux.
Il y a trois options de sortie. Statistiquement, la plupart des indivisions que l’on signe vont se boucler de manière naturelle via une vente. Dans ce cas, le client va toucher dans mon exemple 87 % du prix de cession, en espérant bien sûr que ces 87 % soient supérieurs aux 100 % de sa maison non rénovée. Selon une récente étude des Notaires de France, chaque saut de classe énergétique fait gagner en moyenne 6% de valeur à un bien. La 2e option, c’est le rachat de part, à la valeur du marché. On fait réexpertiser le bien, et le client nous rachète les 13 %, mais cela restera assez exceptionnel. Et enfin, si au bout des 10 ans le client ne souhaite pas vendre sa maison ou nous racheter nos parts, on peut resigner pour 10 ans aux mêmes conditions, soit 30 % de parts supplémentaires. Dans notre exemple, nos 13 % deviennent alors 16,9 %.
On peut avoir des clients qui ne sont pas finançables par les banques parce qu’ils sont très modestes et donc n’ont pas les revenus nécessaires pour obtenir ou rajouter un crédit. Ou bien des personnes qui ne sont pas modestes mais qui ne veulent pas s’endetter de manière supplémentaire ou détricoter leur patrimoine pour rénover un autre bien. Contrairement à une banque, on les critères de revenus, d’âge, de santé ou d’endettement nous importent peu. Nous nous intéressons au bien et à la création de valeur générée par les travaux. Nous sommes capables de financer des projets sans aide, si besoin avancer les aides ou plus classiquement financer uniquement le reste à charge. Mais globalement, le dénominateur commun de nos clients, c’est qu’il s’agit de propriétaires occupants, très motivés pour lancer une rénovation performante mais bloqués par son financement.
Ce que les clients retiennent de Vasco, c’est qu’on paye la totalité de leurs travaux et qu’ils nous rembourseront au moment où ils vendent leur maison. C’est une sorte de prêt in fine, qui n’existe pas ou qui existe de manière parcellaire, via le prêt avance rénovation ou mutation. On propose un chemin alternatif ou complémentaire à celui des banques. Les Français sont attachés à leur pierre mais ils le sont d’autant plus qu’ils peuvent vivre chez eux dans de bonnes conditions.
Nous avons mis en place une foncière qui détient 100 % des actifs. Aujourd’hui, elle s’appuie sur des investisseurs particuliers, et demain, sur des institutionnels, pour lever des fonds, avec un objectif de rendement de 9 % par an. Grâce à son agrément ESUS (Entreprise solidaire d’utilité sociale), les investisseurs peuvent défiscaliser 25% de leur apport.
La majorité de nos dossiers nous sont apportés par des professionnels de la rénovation globale qui présentent la solution Vasco aux clients ayant des difficultés de financement. Cela peut être des artisans, des auditeurs, des architectes ou des accompagnateurs rénov’. Nous avons un partenariat gagnant-gagnant : ils nous apportent des prospects, et on leur permet de débloquer des chantiers. Ce qui nous intéresse, c’est la qualité des travaux puisque l’on est solidaire du prix de revente, à la hausse comme à la baisse. De plus, notre point de départ, c’est non seulement d’accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre du parc bâti français mais aussi, à notre échelle, de participer à la lutte contre la précarité énergétique.
On échange beaucoup avec les ministères. Evidemment, nous avons des intérêts très alignés. Ils essayent de dépenser l’argent public le plus efficacement possible, ils savent que les subventions, ce n’est pas forcément la panacée, et attendent des banques qu’elles financent plus. Nous, on a un modèle alternatif qui ne coûte rien à l’Etat, ils sont évidemment attentifs à notre démarche. Nous n’avons pas encore formé les 2500 conseillers France Rénov’ mais nous y travaillons !
On a lancé la société en août 2023, commencé à proposer notre solution en décembre et récemment recruté nos quatre premières recrues. On a fait nos preuves sur 300 premiers dossiers, et financé à date une dizaine. On souhaite accélérer et changer d’échelle pour financer une centaine de rénovations cette année et 3 fois plus en 2025.