[Dossier spécial] L'après fioul se prépare
Rarement une énergie aura eu aussi mauvaise réputation ces dernières années. Pourtant, il continue d’être utilisé dans des millions d’habitations françaises et permet par sa puissance et sa souplesse de répondre aux besoins de chauffage même pendant les périodes les plus froides. Pourtant, ses jours sont désormais comptés…
Le Premier ministre a annoncé le 14 novembre vouloir aider financièrement les Français qui se chauffent au fioul domestique à changer leur équipement de chauffage avec l’objectif d’éradiquer le chauffage au fioul en France d’ici 10 ans. Cependant, saviez-vous qu’entre 3 et 4 millions de ménages (soit environ 10 millions de Français) se chauffent aujourd’hui au fioul domestique ? Ces consommateurs résident principalement dans des territoires ruraux, non desservis par les réseaux de gaz et/ou de chaleur. De plus, un tiers d’entre eux sont considérés en précarité énergétique. Il est donc difficile d’imaginer que la totalité de ces familles puisse se convertir rapidement à une autre énergie.
Actuellement Aucune solution disponible n’est en capacité de remplacer avantageusement le fioul domestique. Le gaz naturel ne dessert que 10 000 communes sur 35 000 ; la pompe à chaleur (PAC) est peu adaptée aux régions les plus froides, dans lesquelles la consommation électrique de ce type de chauffage peut se révéler importante et accentuer la problématique de la production électrique de pointe. Quant au bois, s’il est mal utilisé, c’est une énergie qui émet des particules fines et provoque donc de la pollution locale. En outre, les équipements de type PAC ou chaudières bois sont onéreux (entre 10 et 15 000 € en moyenne fourniture et pose).
Le GPL, en dépit de son coût élevé, peut néanmoins être une solution de remplacement pour les logements isolés dans la mesure il est possible de remplacer une citerne de fioul par une citerne de propane, tandis que toutes les chaudières gaz à condensation sont compatibles avec ce carburant. Cerise sur le gâteau, les émissions polluantes sont réduites et les particules quasi inexistantes. Par contre, ce choix entraîne certaines obligations de “fidélité” envers le fournisseur d’énergie par la signature de contrat pouvant courir sur des durées allant jusqu’à 5 ans.
Le fioul n’a pas dit son dernier mot
Pour préparer l’avenir et contribuer à la baisse des émissions de CO2 et de NOx, la profession des distributeurs d’énergies hors réseaux, représentée par la FF3C, est engagée depuis plusieurs mois dans un processus de transformation et a déjà annoncé sa volonté de commercialiser de nouveaux produits énergétiques, des bioliquides de chauffage, composés de 10 à 30 % d’EMAG de colza (esther méthylique d’acide gras), qui ont vocation à se substituer complètement au fioul domestique, si possible dès 2024. À terme, l’objectif est d’aller vers un produit composé à 100 % de bioliquide, le plus tôt possible d’ici à 2050. À cet égard, la création de deux nouveaux produits, F10 (10 % d’EMAG de colza) et F30 (30 %), est possible dès l’année prochaine.
En outre, des incitations pourraient être mises en place pour soutenir l’adaptation et/ou la conversion du parc actuel vers des chaudières biocompatibles. Ainsi, l’objectif du gouvernement pourrait être atteint puisque plus aucune chaudière ne fonctionnerait au fioul domestique en 2028. Cependant, la prime à la conversion des chaudières, que vient de lancer le gouvernement à grand renfort de communication, pourrait bien définitivement sonner le glas de cette énergie qui n’a cessé, ces dernières années, d’être fortement décriée.
Une prime de conversion vraiment convaincante
Cette prime à la conversion s’adresse à tous les ménages, mais l’aide financières est renforcée pour ceux classés dans les catégories “très modestes” et “modestes”. Ainsi, pour le remplacement d’une chaudière au fioul à charbon ou au gaz (hors condensation) vers une chaudière biomasse de classe 5, une pompe à chaleur air/eau ou eau/eau, une PAC hybride ou un système solaire combiné (SSC) :
- - les ménages très modestes (revenus fiscaux annuels inférieurs à 21 001 € ou 29 171 € en Île-de-France) seront aidés à hauteur de 4 000 € au titre des CEE + 50 % du coût HT du matériel et de la pose (subvention de l’Anah HM Agilité), sans oublier le CITE de 30 % ;
- - pour les ménages modestes (revenus fiscaux annuels de 2 personnes inférieurs à 26 923 € ou 35 510 € en Île-de France), cette prise en charge sera respectivement de 4 000 € + 35 % + 30 % de CITE ;
- - quant aux autres ménages, la facture globale sera allégée de 2 500 € au titre des CEE auxquels s’ajoutera le crédit d’impôt de 30 %.
TRAVAUX PRATIQUES : Remplacement d’une chaudière fioul par…une pompe à chaleur
- 4 000 € au titre des certificats d’économie d’énergie ; - 3 981 € au titre des aides de l’Anah (Programme « Habiter mieux »).S’ajoutent les 1 206 € de crédit d’impôt transition énergétique (CITE de 30 % du coût, aides déduites). Le ménage a donc un reste à charge de 2 813 €, qu'il peut couvrir en contractant un éco-prêt à taux zéro, en profitant du fait qu’à compter de mars 2019, il y sera éligible même s’il ne réalise pas un bouquet de travaux. Sur 5 ans, soit 563 €/an, les mensualités s’élèveront à 47 €.
TRAVAUX PRATIQUES : Remplacement d’une chaudière fioul par…une chaudière granulés bois
Quelques chiffres
- 60 % La part du chauffage dans la consommation finale d’énergie des résidences principales.
- 3 à 4 millions Le nombre de ménages se chauffant actuellement au fioul.
- 300 000 Le nombre de chaudières fioul que le gouvernement voudrait voir remplacées chaque année jusqu’en 2027.
- 1 million Le nombre de tonnes de gaz à effet de serre qui pourrait être évitées chaque année en mettant fin aux chaudières fioul.
- 900 à 1 200 C’est, en euros par an, l’économie potentielle sur la facture d’énergie d’un ménage s’il remplace son mode de chauffage à énergie fossile par un générateur fonctionnant aux EnR.