Grand Palais Ephémère : lorsque le temporaire se fait durable

Grégoire Noble
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[Zepros Bâti] Le Grand Palais déménage temporairement et troque son immense verrière à charpente métallique pour une grande nef de bois signée Wilmotte. L’édifice provisoire, prévu pour accueillir des expositions, salons et événements culturels ou sportifs – y compris des épreuves des JO – pendant 4 années, le temps que le Grand Palais historique soit rénové, sera monté en seulement 6 mois par les équipes de Mathis SAS. Avant de connaître plus tard, une seconde vie ailleurs… Reportage.

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La manœuvre est précise, délicate. Lentement, la ferme courbe de 50 mètres de portée libre et 10,5 tonnes se redresse dans les airs, soulevée par deux grues aux mouvements synchronisés. Cette pièce de bois et d’acier, vient se positionner en quelques minutes à sa place, où elle sera boulonnée aux fondations béton avant d’être solidarisée à sa voisine par des butons. L’opération prendra quelques heures et sera répétée de nombreuses fois : 44 fois en tout pour donner sa forme caractéristique au Grand Palais Ephémère, œuvre de Jean-Michel Wilmotte. Emmanuel Marcovitch, directeur général délégué à la Réunion des Musées Nationaux, explique : « Il s’agit d’un projet majeur, destiné à accueillir les grandes manifestations artistiques, culturelles et sportives, pendant les travaux du Grand Palais historique ».

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Un bâtiment monolithique à échelle monumentale

L'emplacement choisi ? Celui des expositions universelles de Paris : les pelouses du Champ de Mars, entre la tour Eiffel – une autre construction temporaire qui a finalement trouvé sa place dans le paysage parisien – et l’Ecole militaire. Le directeur général délégué de la RMN poursuit : « Un lieu iconique, empreint d’histoire, de modernité, d’innovation mais aussi d’éphémère », évoquant le pavillon de l’Electricité qui s’y tenait en 1937. « Dans cette perspective, l’architecture a été une donnée maîtresse. L’ambition, très présente, est également environnementale pour préserver un site classé qui sera remis en l’état après le démontage du bâtiment, à l’issue des Jeux Paralympiques ». L’imposante charpente de bois, qui présente quatre ailes et une croisée de voutes centrale, pourra en effet être démantelée puis remontée, tout ou partie, ailleurs, afin de connaître une seconde vie aux mains de GL Events, qui en sera propriétaire.

Louis Lafargue, architecte en charge du projet pour l’agence Wilmotte, détaille les choix qui ont été faits : « L’empreinte disponible au sol avait une forme de croix, sur le parvis Joffre, dans l’axe tour Eiffel-Ecole militaire. Ce qui a dicté le choix de deux nefs croisées d’environ 140 mètres de long chacune, l’une de 51 mètres de large et l’autre de 33 mètres. Une solution qui offre le moins de supports possibles et dégage un espace ininterrompu ». Les courbes posées au sol définissent ainsi une transition douce entre le sol et le ciel de la capitale, sans angle vif. Sur le choix du matériau bois, le maître d’œuvre argumente : « Pour son bilan carbone, parce qu’il est réutilisable et pour ses capacités en compression qui sont fantastiques ». En structure, les épaisseurs des doubles membrures sont fortes permettant d’assurer une excellente performance d’isolation acoustique, l’un des enjeux principaux de ce projet. À l’extérieur, comme ce qui a été réalisé au stade Allianz Riviera de Nice, la charpente sera recouverte d’une membrane ETFE translucide sur les côtés et PVC opaque sur la partie supérieure. « Le principe architectural est totalement inversé par rapport au Grand Palais où la verrière occupe la partie sommitale », s’amuse Christophe Veau-Cahon, directeur chez GL Events. Les côtés de la coque intérieure seront traités avec des prémurs béton en partie basse, tandis qu’une enveloppe rigide imperméable avec panneaux sandwich métallique et laine de roche assurera l’isolation à l'intérieur de la voute.

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Une prouesse de la construction en bois

Le bâtiment temporaire sera toutefois très sophistiqué, par la variété des usages qui en sera fait : compétitions sportives – comme le Saut Hermès, les épreuves olympiques de taekwondo ou du basket indoor – ou salons professionnels artistiques comme la FIAC, Paris Photo ou Art Paris Art Fair. Le système de climatisation et de production d’eau chaude sera logé, en partie, dans un bâtiment annexe, installé dans une clairière du parc toute proche. Des pompes à chaleur et des centrales de traitement d’air assureront ces missions. Et le tout sera livré en seulement 6 mois, grâce au travail des charpentiers de l’entreprise Mathis, mobilisés depuis l’été. Son président, Frank Mathis, fait valoir : « En tout 500 tonnes de bois seront nécessaires aux 44 portiques préfabriqués en usine pour un assemblage et un levage sur site. Les essences choisies sont l’épicéa et le pin Douglas, pour les parties exposées aux éléments ». Des bois européens, découpés et façonnés dans l’usine strasbourgeoise de la société. Un volume impressionnant que ne mobilise qu’une quinzaine de personne pour le montage, preuve que la préfabrication est un gage d’efficacité. Au rythme actuel, le bâtiment s’allonge d’une membrure par jour, le temps que l’élément soit mis en place et sécurisé.

La livraison de ce pavillon éphémère – mais durable – est attendue pour le mois de février 2021. Juste à temps pour la sortie du confinement hivernal et la reprise de la vie culturelle et artistique. Et largement avant la tenue du Forum International Bois Construction qui ne pouvait rêver d'un plus bel écrin !

G.N.

Grégoire Noble
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