TOP 100 Négoce : « Le rattrapage est évident, tous les clients le demandent », Didier Goguelin (Berner France)

Grégoire Noble
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[Zepros Négoce] Résultats de 2019, gestion de la crise du Covid, perspectives sur l'emploi ou les investissements... Dider Goguelin, le directeur général de Berner France nous raconte l'année écoulée depuis le dernier TOP 100 pour l'entreprise spécialisée dans la quincaillerie et l'outillage pour les professionnels.

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Zepros Négoce : Comment s’est déroulé l’exercice 2019 ?

D. G. : Ça s’est très très bien passé avec +8 % de croissance. Notre chiffre d’affaires, qui atteint les 250 M€, se répartit entre la construction (52 %), la mobilité – c’est-à-dire les véhicules légers, camions et machines agricoles – pour 39 % et la maintenance industrielle/MRO à 9 %.

Zepros Négoce : Puis le mois de mars 2020 est arrivé avec le confinement…

D. G. : Nous avons essayé de maintenir l’activité mais le réseau de distribution s’effondrait. A partir du 17 mars, l’impact a été de -22 % sur le mois. En quinze jours, nous avons perdu 8 M€ de chiffre d’affaires.

Zepros Négoce : Quelle est votre organisation particulière ?

D. G. : Notre siège et notre entrepôt logistique de 46 000 m² se situent dans l’Yonne pour livrer partout en France nos clients. Pour nous rapprocher d’eux, nous avions ouvert un point de vente à Lyon, en avril 2019, puis un autre à Lille, en décembre. Il devait s’en ouvrir un à Paris, en avril 2020, mais cela a été décalé dans le temps à janvier 2021. Ces points de vente sont importants pour offrir des services : la livraison sur chantier, des casiers sécurisés avec digicodes accessibles 7j/7 et 24h/24, la location ou le prêt de machines… Tout ce qu’il faut pour aider nos clients à faire leur métier.

Zepros Négoce : Comment avez-vous fait face à cette situation inédite ?

D. G. : Pour un atterrissage en douceur, nous avons maintenu au maximum les équipes au travail. Puis nous avons été contraints de réduire la voilure. Chômage partiel, télétravail, tout le monde a été impacté sauf la logistique qui a adopté des mesures de protection strictes : masques, gants, gel hydroalcoolique, contrôles des accès et vérification de la température. Nous avons donc continué à livrer nos clients. Les équipes de ventes ont continué leur travail de chez eux, en constituant un « call center » virtuel.

Zepros Négoce : Quelles sont les perspectives pour la reprise ?

D. G. : En avril nous avons sauvé les meubles, mais nous enregistrons tout de même un -70 %. En mai, la reprise avait été anticipée avec plus de gens au travail, des circuits balisés et un sens de circulation dans les magasins, comme chez Disney. Les vendeurs ont repris leur activité dans l’ouest et le sud-ouest au début du mois de mai. A la fin mai, tout le monde était reparti au travail, avec des pertes limitées (-10 %), ce qui est une bonne récupération. Nous avons continué à assurer le service ! Juin est un très beau mois avec +14 % par rapport au niveau de 2019. Le rattrapage est évident, tous les clients le demandent. Et cela s'est poursuivi en juillet-août. Mais à la rentrée, pour le 3e trimestre, on les sent plus inquiets avec moins de visibilité en septembre-octobre. Une 2e vague risque de compliquer encore plus les choses. Il y a donc beaucoup d’incertitudes sur la fin d’année. Compte tenu de ce que nous avons connu en avril-mai, notre objectif est un CA en repli de 9 % sur l’ensemble de l’année. Mais la crise, pour nos clients, elle est devant.

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Zepros Négoce : Y-a-t-il eu des difficultés particulières pour vous ?

D. G. : Il y avait un problème pour mettre des gens dans un même espace. La solution a consisté à allonger les horaires de 6 heures du matin à 22 heures le soir, toujours en accord avec les salariés et les partenaires sociaux. Le dialogue a été fort. Et le télétravail permet plus de souplesse. Nous avons négocié également sur les congés payés, pour qu’ils soient liquidés avant le mois d’août. Car nous nous attendons à davantage d’activité à ce moment-là. Le but est de se remettre au travail le plus vite possible. Pour les commerciaux, les objectifs seront compliqués à fixer, notamment pour la part variable de leur salaire. Il ne faudra pas être pénalisants et changer un peu le système pour s’adapter.

Zepros Négoce : Des conséquences sur l’emploi ou les investissements ?

D. G. : Il n’y aura pas de licenciements, c’est le but de la direction de l’entreprise. Mais nous avons arrêté les intérimaires malheureusement. Et les promesses d’embauches qui dataient d’avant le coronavirus ont été tenues, y compris depuis le début du mois de juin. Sur 1 500 salariés nous avons environ 30 nouveaux arrivés. Au point de vue trésorerie, les mesures gouvernementales ont été extrêmement bénéfiques. Mais à un moment, il faudra bien payer et là, il y aura de la casse. Tout dépendra de l’ensemble des acteurs économiques, consommateurs, grands groupes, gouvernement. Cela peut très bien se passer, tout comme l’attentisme ne soutiendrait pas l’activité. Nous avons, pour notre part, une vision optimiste, notre ordre de marche est donc décalé dans le temps mais les investissements sont maintenus.

Zepros Négoce : Identifiez-vous des tendances ?

D. B. : Nous avons beaucoup utilisé le SEO (référencement naturel sur Internet) et travaillé les flux pour amener des clients. Nous avons produit des vidéos explicatives pour l’utilisation de nos produits et développé une plateforme de e-learning pour les formations en interne. Nos collaborateurs ont ainsi pu continuer à se former avec de nouveaux outils adaptés.

Zepros Négoce : Au point de vue personnel, quels enseignements tirer ?

D. G. : J’ai vécu cette période comme une crise extrêmement grave, un véritable état de guerre, selon les mots du Président. Mon souci a été de protéger nos salariés tout en servant nos clients. Il a fallu adopter de nouveaux process de communication, avec des visioconférences hebdomadaires pour expliquer les solutions apportées aux problèmes rencontrés. Par exemple, notre importante force de vente a connu des départs qui étaient prévus au mois de mars. Mais comment récupérer le véhicule de fonction en toute sécurité ? Nous avons trouvé une solution. Et tout a été comme ça, en permanence, à chercher des réponses avec la cellule de crise. Nous avons été d’une transparence totale avec nos salariés en expliquant toutes les décisions. Nous sommes tous dans le même bateau.

Zepros Négoce : Qu’en est-il au niveau du groupe ?

D. G. : La France est la première filiale, hors Allemagne. Nous avons communiqué notre plan de crise à la maison-mère et bénéficié du soutien total du groupe. Des lignes de crédit sont disponibles, car le Prêt garanti par l’Etat prend du temps et tout ne va pas aussi vite qu’on ne le pense. Cette période nous a appris beaucoup de choses, notamment sur le « remote management ». Nous avons gardé le contact avec les gens, il n’y a pas eu d’isolement. Il faudra toutefois faire attention à ne pas sous-estimer l’intérêt d’une présence physique au bureau, pour continuer à assurer le lien social.

Propos receuillis par Grégoire Noble

Grégoire Noble
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