Aucun retournement du marché selon la Capeb
Même si certains indicateurs économiques sont au vert (dont la reprise des transactions dans l'immobilier ancien), l'activité des artisans du bâtiment reste morne. L'incertitude gouvernementale et réglementaire pèse encore sur le moral des ménages et des entrepreneurs, incitant à toujours plus de prudence.
Jean-Christophe Repon n’a pas mâché ses mots lors d’un point presse sur l’activité des artisans du bâtiment. Le président confédéral – ancien joueur de rugby – a le sentiment de « jouer un match contre le vent et d’en être à la 6e mi-temps ». Car les remaniements ministériels, les évolutions des dispositifs d’aide et les atermoiements budgétaires, font que rien n’avance jamais vraiment pour le secteur. Et cela se traduit dans les chiffres : « Sans surprise, ils ne sont toujours pas positifs, en décroissance régulière depuis 2 ans… », annonce-t-il en préambule.
De fait, même si certains indicateurs économiques sont plutôt encourageants, comme un pouvoir d’achat maintenu grâce à une épargne haute, une inflation stabilisée, des taux d’intérêts raisonnables et des crédits à l’habitat qui progressent, les TPE et PME de la construction et de la rénovation souffrent toujours. Leur activité s’établit à -3,5 % par rapport au 3e trimestre 2024, avec un segment du neuf plus touché (-6 %) et des secteurs de l’amélioration-entretien et de la rénovation énergétique toujours pas en forme (-1,5 %).
Toutes les régions et tous les métiers touchés
Selon les territoires et les corps de métiers, l’impact est légèrement différent (entre -2 % et -5,5 %) mais toutes les régions et toutes les filières sont affectées (menuisiers et maçons sont plus impactés que les couvreurs, plombiers et chauffagistes). Quant aux perspectives, elles sont mitigées puisque les autorisations et mises en chantier ont légèrement remonté depuis le printemps, mais restent à des niveaux très faibles (365 200 autorisations cumulées sur 12 mois et 272 800 chantiers lancés). En 2022, le nombre d’autorisations tutoyait les 550 000 et les mises en chantier dépassaient les 400 000 unités. Certes les ventes de logements anciens repartent (+9 %) avec 912 000 transactions. Mais cela ne suffit pas encore à relancer la dynamique pour tout le monde du BTP. Romane Charpentier (département statistique Capeb) analyse : « Les carnets de commandes reprennent +6 jours entre le 2e et le 3e trimestre 2025, avec 74 jours d’activité. Mais l’emploi salarié reste à -2,9 % ». Environ 40 000 emplois ont été détruits entre 2024 et la première moitié de 2025… Les créations d’entreprises restent en repli (-5,8 % avec 21 000 nouvelles entités au 2e trimestre de 2025) et les défaillances se font un peu moins nombreuses (-1,8 % avec 3 700 disparitions au 2e trimestre). Quant au besoin moyen de trésorerie s’établit à 26 000 € par entreprise.
Faire entrer les Français dans un parcours de rénovation accompagné
Le président de la Capeb se dit inquiet, à la fois sur la dégradation de cette trésorerie et sur les perspectives sur l’emploi pour des entreprises qui ont en général moins de 4 salariés. Les TPE/PME ont ainsi le sentiment d’être pris en tenaille entre des grands groupes qui bénéficient des mêmes aides et avantages qu’elles, notamment sur l’intégration d’alternants, et de l’autre côté, des microentrepreneurs qui n’ont pas de compte à rendre jusqu’à un seuil de 87 k€ et à qui on ne demandera pas de facture électronique… « Sur 55 000 entreprises RGE, 22 000 sont adhérentes à la Capeb. Elles ont fait l’effort de se former et de se qualifier. Le marché ne doit pas s’organiser sans les artisans ».
Selon Jean-Christophe Repon, les petites entreprises font les frais d’un manque de gouvernance et de stratégie globale : « Regardez avec la suppression de l’isolation des murs en mono-geste. Il n’y a aucune cohérence énergétique ». Il martèle à nouveau toute l’importance de créer un parcours de rénovation, accompagné pour les particuliers à son lancement, pour faire rentrer les Français dans des sauts de classes DPE. « Pour la énième fois, nous présenterons aux nouveaux ministres du Logement, de l’Artisanat et du Budget nos propositions ». Car si les points de vue de la Capeb sont partagés, notamment par Coedis ou Uniclima, les arbitrages ne sont jamais rendus dans le même sens. D’où l’idée de porter la voix plus fort, pour les entrepreneurs du bâtiment soient finalement entendus à la hauteur de leur contribution au tissu socio-économique dans les territoires. Peut-être avec une mobilisation en décembre après concertation avec les adhérents et représentants régionaux ?