Groupe Saint-Gobain : Benoit Bazin appelle à un plan Marshall de la rénovation

Marc Wast
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Saint Gobain Benoit Bazin Thierry Fournier

Un vent nouveau semble souffler dans la constellation Saint-Gobain depuis quelque temps. À l’occasion des vœux à la Presse, le binôme formé par Benoit Bazin et Thierry Fournier, respectivement directeur général du groupe et directeur général Europe du sud, Moyen-Orient et Afrique, a parfaitement fonctionné pour rendre compte du bilan 2022 et donner quelques pistes sur la stratégie 2023 de l’entreprise.

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En attendant la communication officielle des résultats du groupe le mois prochain, Benoit Bazin a indiqué que « 2022 a été une année record pour Saint-Gobain avec une croissance à deux chiffres pour les ventes et les résultats après une période d’optimisation du périmètre des activités ».
Petit bémol, cette performance se fait dans un contexte inflationniste notable (+15 % sur le 3e trimestre 2022) mais elle reste remarquable du fait de l’explosion des prix des énergies et des matières premières avec une augmentation des coûts légèrement supérieure à 3 milliards d'euros en 2022 par rapport à 2021.

Avancer pour la neutralité carbone

Le groupe continue de travailler à la baisse drastique de ses émissions carbone, avec une neutralité à horizon 2050. Benoit Bazin explique : « Notre cap est le bon puisque nous avons enregistré une baisse de 23 % de nos émissions de CO2 entre 2017 et 2021 et nous devrions tenir notre objectif de -33 % en 2030. Au niveau industriel, quand c’est possible localement, nous convertissons nos usines à l’électrique. En Finlande, nous avons fait un test de production de laine de verre à partir d’une nouvelle composition de matières premières, d’une nouvelle technologie de fibrage et en utilisant 100 % de biogaz pour le four verrier. Cette performance technique a permis d’économiser jusqu’à 97 % les émissions de CO2 du scope 1. Saint-Gobain a commencé à déployer au 3e trimestre une offre de verre bas carbone ORAÉ® à haute efficacité énergétique. Le Groupe a également lancé “Saint-Gobain Glass Recycling” afin de recycler en boucle fermée le vitrage en fin de vie. Engagée dans une démarche d’accélération de la transition vers une économie circulaire, l’entreprise a récemment commercialisé la première plaque de plâtre conçue à partir de plus de 50 % de plâtre recyclé : Placo Infini 13 ».

Ces innovations technologiques s’accompagnent d’un programme pour développer la construction en terre d’excavation ; plusieurs chantiers sont en cours notamment en région PACA. La chasse au carbone passe aussi par une logistique optimisée au sein de Saint-Gobain Distribution Bâtiment, notamment chez Point.P en favorisant l’utilisation de modes de transport moins polluants (fluvial, camions hybrides, au gaz…).

France : accélérer la rénovation énergétique

Malgré les excellents chiffres de “gestes” rénovation effectués ces dernières années, beaucoup de travail reste à faire pour éradiquer les quelque 5 millions de passoires thermiques sur notre territoire. Pour Thierry Fournier, « si la consommation d’énergie nationale baissait de 10 %, nous pourrions nous passer des services de 7 tranches de centrales nucléaires. Et le potentiel d’économie est très important quand on sait que 80 % des bâtiments de 2050 existent déjà. Autre marqueur, si tout le parc de logements était labellisé BBC en 2050, nous n’aurions plus besoin d’importer de gaz ».
Sans parler de l’entrée en vigueur du décret tertiaire qui va être un levier important pour toute la filière. « Raison pour laquelle Saint-Gobain se doit de jouer un rôle pédagogique pour ce nouveau pan de la rénovation énergétique en éditant une série 3 livres blancs sur le logement collectif qui vient de sortir, l’éducation et la santé (à venir prochainement), précise Thierry Fournier. 300 000 emplois supplémentaires pourraient être créés si l’ambition de soutenir la rénovation énergétique se révélait pérenne ! ».

Cette perspective pose la question de la disponibilité de la main d’œuvre et de son niveau de compétence. Saint-Gobain continue d’être moteur en termes de formation en proposant de nombreux services à destination de l’artisan et des TPE/PME. Mais cette montée en puissance ne pourra être réellement possible que si nos gouvernants augmentent l’enveloppe au titre de MaPrimeRénov’ aujourd’hui “limitée” à 2,5 Md€.
« Il serait judicieux de basculer de la facture vers l’investissement, prévient Benoit Bazin. Même si des arbitrages sont nécessaires pour répondre à l’urgence liée à l’explosion des prix des énergies, interrogeons-nous sur le gaspillage budgétaire actuel. Flécher différemment une partie des 45 Md€ permettrait de financer des rénovations plus qu’urgentes, qui aboutiraient à réduire drastiquement la facture de chauffage. Une manière de démarrer le plan Marshall que j’appelle de mes vœux pour que chaque logement puisse être source de bien-être et de bien vivre ensemble », conclut le dirigeant.
Une simple question de bon sens, une fois encore.

Toujours plus international

C’est un grand chantier qui court depuis 2018. Recentrer le groupe sur des activités porteuses en cédant celles qui sont trop spécialisées ou peu rentables. L’année dernière encore, les cessions se sont établies à 9 Md€ pour 4 Md€ d’acquisitions. Pour ces dernières, c’est la chimie du bâtiment qui tient le haut de l’affiche avec l’intégration de Chryso, d’Impac et plus récemment de GCP Applied Technologies, ceci afin de proposer des solutions innovantes en termes de décarbonation des solutions béton. Cette stratégie internationale change un peu la répartition des résultats du groupe. « Désormais, un tiers provient de l’Amérique du Nord, un autre tiers de l’Europe, tandis que le dernier tiers est issu de l’Asie et des pays émergents, explique Benoit Bazin. Et le marché nord-américain continue de tenir ses promesses avec une croissance annuelle moyenne de 13 % (pour un CA de 10,5 Md$) et une rentabilité multipliée par 2 depuis 2018 ». Ce continent fait également l’objet d’investissements importants, de l’ordre de 5 Md$ en 3 ans. Toujours au chapitre des acquisitions, notons l’activité de laine de roche Rockwool India ainsi qu’un partenariat stratégique avec le spécialiste suisse du photovoltaïque en façade, Mégasol.

Marc Wast
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