Pour produire davantage, le panneau solaire doit rester propre et frais

Grégoire Noble
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[Zepros Energie] C’est paradoxal mais l’ennemi du photovoltaïque est… la chaleur. En effet, le rendement des capteurs s’effondre au fur et à mesure que le mercure monte. Deux sociétés françaises ont donc mis au point différents systèmes de rafraîchissement des panneaux par pulvérisation d’eau. Avantage supplémentaire : la surface des cellules est rincée des poussières et autres saletés, améliorant encore l’efficacité du système.

Les beaux jours reviennent et la production d’électricité solaire gagne chaque jour un peu plus en efficience. Si la température atmosphérique ne dépasse pas – pour l’instant – les 20 °C dans les régions méridionales, la température à la surface vitrée des panneaux photovoltaïques grimpe elle beaucoup plus haut. Et c’est un problème puisque si l’optimum de fonctionnement des capteurs se situe aux alentours de 25 °C, chaque degré supplémentaire fait perdre 0,5 % de rendement… En plein été, si l’installation grimpe à 80 °C, l’efficacité est donc diminuée de plus de 25 % ! Certaines entreprises proposent des panneaux hybrides, qui évacuent en sous-face cette chaleur pour l’utiliser dans des pompes à chaleur ou des chauffe-eau, comme Dual Sun ou Base. Mais comment faire pour les installations existantes dont les capteurs ne sont pas prévus pour ça ? Deux sociétés françaises, SuniBrain et SunBooster, répondent : en les aspergeant.

Plutôt douche écossaise ou cascade tempérée ?

Grégory Boutteau, le président de SunBooster, nous explique : « L’idée est venue d’un client qui constatait que ses panneaux ne supportaient pas beaucoup la chaleur et qui souhaitait trouver une solution pour les refroidir ». Quoi de plus simple alors que de recueillir et de stocker de l’eau de pluie dépourvue de calcaire, afin de la réutiliser au bon moment ? SuniBrain et SunBooster proposent exactement ce concept, mais la première mise sur la brumisation tandis que la seconde fait le pari de la lame d’eau. Grégory Boutteau poursuit : « La brumisation a quelques limites, à mon sens. Sa consommation d’eau est supérieure puisque l’eau s’évapore pour évacuer la chaleur. Puis ce procédé est plus sensible au vent. Enfin, l’eau froide, pulvérisée sur les panneaux, risque de créer un choc thermique avec potentiellement des fissures. Au bout de 400, 600 ou 800 cycles, ils sont amochés ». SunBooster s’oriente donc vers un écoulement laminaire, en continu tout au long de la journée, là où SuniBrain brumise uniquement lors des pics de chaleur grâce à une gestion automatisée. L’eau du système SunBooster est recueillie au bas des panneaux et fonctionne en circuit fermé, ce qui stabilise naturellement sa température vers les 30 °C, et qui maintien également à ce niveau les panneaux solaires, soit une élévation très limitée de leur mercure et un gain de productivité non négligeable. D’autant que l’eau lessive les capteurs et les débarrasse des poussières et des pollens qui pourraient s’y accumuler. A noter que les deux sociétés possèdent des outils de simulation numérique qui permettent de modéliser les installations et d’évaluer les déperditions selon la météo, le vent, l’orientation, etc.

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« En instantané, le gain est de +25 % mais cette valeur n’a pas beaucoup de sens. Lissé sur toute l’année, il est compris entre +8 et +12 % », nous confie le président de SunBooster. Chez le concurrent, les chiffres avancés sont du même ordre : +35 % de puissance instantanée, +13 % de gains annuels et +18 % de rentabilité pour l’installation. Grégory Boitteau reprend : « Nous avons fait vérifier les chiffres par Bertin Energie Environnement qui a conclu que notre système était respectueux de l’installation et efficace ». Evidemment ces systèmes ont un coût, puisqu’il faut équiper les toitures de récupérateurs d’eau de pluie, de filtres pour éliminer les particules en suspension, de pompes de circulation et d’une citerne souple de grande capacité. Car les solutions d’aspersion ne s’adressent pas à des petites centrales individuelles mais à des grandes toitures. Le fondateur de SunBooster annonce : « Pour les particuliers c’est exclu. Mais à partir de 100 kWc cela devient pertinent et pour une centrale de 250 kWc la rentabilité est excellente. Nous n’avons d’ailleurs pas de plafond, puisque nous avons à l’heure actuelle une douzaine de systèmes en fonctionnement sur des installations photovoltaïques allant de 100 à 1 000 kWc ». Côté entretien, la société a voulu son offre comme simple, robuste et fiable : « Il n’y a pas de consommables, pas de traitement chimique de l’eau, ni d’intervention fréquente. Il n’y a qu’une mise en hivernage qui est nécessaire, à l’automne, avec une vidange automatique et un contrôle complet des filtres ».

Si toutes les centrales étaient équipées, la capacité française ferait un bond de +1 GW

Initialement prévu pour les panneaux en intégration totale, SunBooster a développé un système de jointoiement pour les autres types d’installation et ainsi ne pas perdre une goutte de l’eau de pluie. Les systèmes de refroidissement s’adressent donc autant au neuf qu’à l’existant, à une limite près : « Sur l’amorphe ou la couche mince c’est possible, mais le marché est plus restreint et le gain réel reste à évaluer. Il pourrait être deux fois moindre que pour des modules cristallins », avertit Grégory Boutteau. Quant aux supports, l’entreprise sait désormais s’adapter aux ombrières, aux serres agricoles et bientôt aux centrales au sol. « L’idée sera de pouvoir répondre aux futures grandes installations qui produisent de l’électricité à seulement 20 centimes/kWh », nous confie-t-il. Afin de répondre au développement attendu de ce marché de l’amélioration du rendement photovoltaïque, SunBooster, qui développe et installe seule ses produits, entend mettre en place un réseau de partenaires locaux dans un avenir proche. Ces professionnels seront soigneusement sélectionnés pour leur aptitude à gérer à la fois l’électricité et l’hydraulique. Le pdg estime que si toutes les centrales photovoltaïques françaises étaient équipées de telles solutions, c’est un gain de puissance de 1 GW qui serait récupéré ! Les pouvoirs publics seraient bien avisés d’y réfléchir.

G.N.

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