Les défaillances dans la construction repartent à la hausse
La France a connu 42 500 défaillances d’entreprises en 2022, dont un quart dans le secteur de la construction. Le coup d’arrêt porté à la construction neuve et la baisse des aides à l'isolation pourraient être à l’origine de cette situation. Le volume reste toutefois inférieur à celui de la période pré-Covid.
Les défaillances et sauvegardes d’entreprises ont été scrutées par le groupe Altares : en 2022, 42 500 procédures ont été ouvertes, en très forte hausse par rapport à 2021 (+50 %). Malgré tout, le niveau reste encore très inférieur à ce qu’il était en 2019, avant la pandémie mondiale et les mesures de sauvegarde de l’activité. Thierry Millon, directeur des études, explique : « Depuis 2020, 103 000 entreprises ont fait défaut contre 162 000 durant les trois années précédentes. 59 000 défaillances ont ainsi été épargnées grâce notamment aux dispositifs d’aides publiques déployés pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire puis de la guerre en Ukraine ». Pour autant, si le risque a été temporairement neutralisé, les entreprises ne sont pas sorties indemnes des dernières années de chahut. Le spécialiste d’Altares souligne que les TPE/PME en particulier, présentent « des structures financières très dégradées (un tiers des TPE) ou était insuffisamment capitalisées (20 % des PME) ».
Si les défaillances touchent toutes les tailles d’entreprises, la situation semble plus préoccupante pour les PME (entre 10 et 99 salariés) avec un rythme supérieur à la moyenne (+78 % par rapport à 2021). Les sociétés les plus importantes sont plus immunes par rapport à ces défaillances, avec moins d’une centaine de procédures (+28 %). Spécifiquement, le secteur de la construction concentre un quart des faillites. En 2022, il est repassé au-dessus des 10 000 procédures ouvertes (+34 %). La tendance reste donc inférieure elle aussi à la moyenne nationale. Le second-œuvre affiche une dégradation rapide (+51,5 %), surtout pour les entreprises spécialisées dans l’isolation (+94 %) qui ont déjà retrouvé le niveau de défaillances de 2019 avec plus de 200 cas répertoriés. Le gros œuvre et en particulier la maçonnerie générale (+22,5 %) sont également touchés mais dans des proportions moindres, tout comme la construction de maisons individuelles (+21 %).
Inflation, remboursement du PGE… attention à la tréso !
Territorialement, les défaillances (tous secteurs confondus) se concentrent en Île-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur, avec respectivement 9 200 et 4 500 procédures engagées. Mais le rythme de progression est cependant inférieur à celui des autres régions, qui ont donc tendance à combler l’écart. Ainsi, certaines régions enregistrent des augmentations supérieures à +60 % (Bretagne, Normandie, Corse, Occitanie), quand d’autres flambent comme les Hauts-de-France (+77 %).
Thierry Millon conclut : « Le cataclysme n’a pas eu lieu en 2022, [mais] le rythme est plus soutenu qu’envisagé, faisant craindre un retour aux valeurs d’avant crise plus tôt que prévu ». D’après le directeur des études d’Altares, le niveau de 2019 pourrait être atteint et dépassé dès cette année et même dépasser les 55 000 défaillances annuelles. « Pour certaines TPE/PME les chances de survie sont compromises. Pour certaines, la fragilité de leur structure financière est en cause. Pour d’autres, c’est paradoxalement leur incapacité à honorer des carnets de commandes pourtant bien remplis qui pourrait les amener au défaut. En cause, les difficultés d’approvisionnement, l’explosion des coûts des matériaux et les problèmes de recrutement. Dans tous les cas, les prêteurs seront plus exigeants et se concentreront sur les sociétés dont les bilans seront les plus solides ». Le remboursement des PGE et l’inflation pèseront lourd dans la balance.