La renaissance d'un château devenu maternelle
C’est un des grands chantiers d’Auvergne au même titre que l’Hôtel-Dieu ou la cathédrale de Clermont-Ferrand. Mais c’est sans doute le seul de France consistant à restituer la toiture d’un château, brûlée en 1990, pour le transformer en école. À Saint-Cirgues-sur-Couze près d’Issoire (Puy-de-Dôme), cette ancienne résidence secondaire de grands féodaux auvergnats va ainsi connaitre une nouvelle vie.
« Ce château, détruit par un incendie qui a ravagé les corps de logis et les toitures, a été abandonné par son ancien propriétaire, le comité d’entreprise du groupe chimique Rhône Poulenc qui s’en servait pour les colonies de vacances. Comme le site avec ses 2 hectares de parc nous intéressait, nous l’avons acheté. À partir de 2007, nous avons réfléchi à un projet de réhabilitation avec un chantier provisoire pour le mettre hors d’eau et consolider des voûtes », explique Philippe Garnavault, maire et président du syndicat intercommunal scolaire. Ce projet est lauréat du prix « Engagés pour le patrimoine », organisé par les ministères de la Cohésion des territoires et de la Culture ainsi que la Fondation du patrimoine. Il est aussi accompagné par le fonds vert dans le cadre de l’accélération de la transition écologique dans les territoires.
En 2014, soutenue par l’État, une étude établit un projet à 5 M€ pour le château. « À force d’obstination, nous avons regroupé plusieurs communes pour présenter un projet d’intérêt public afin d’assurer l’entretien du bâtiment ce qui nous a permis d’obtenir les financements. Comme notre école était vétuste, on a pu fusionner les deux projets. », se félicite le maire.
Restituer pour ne pas dénaturer
Le chantier, suivi par la DRAC, a débuté en juin 2023 par la démolition d’une annexe en béton et résine polyester, la consolidation des maçonneries et la pose de dalles. « La Conservation des Monuments Historiques n’a pas exigé une réhabilitation à l’identique mais une restitution pour que le bâtiment ressemble à l’original dessiné par l’architecte diocésain Aymon-Gilbert Mallay qui a travaillé à la basilique Notre-Dame du Port à Clermont-Ferrand et Nicolas Pomel d’Issoire (transformé en centre culturel après un incendie). La hauteur d’origine des toits est respectée, les murs de refend, qui seront doublés pour respecter les normes anti-feu, ont été remontés sur l’emplacement des murs d’origine », indique l’élu. Toutes les corniches en pierre ont été restaurées et les 1 250 m² de charpente seront recouverts d’ardoise.
Les fermes sont taillées sur place par les charpentiers de l’entreprise Maurice Nailler, spécialisée dans la restauration du bâti ancien. Les lucarnes ressembleront à celles d’origine, en moins ouvragées pour limiter la dépense. Le long de la façade, des œils-de-bœuf laisseront passer la lumière naturelle dans les salles de classe. Une fois que la couverture des toits et des tours sera terminée, les menuiseries seront restaurées et l’aménagement poursuivi grâce aux arrêtés de subvention. Quelques pièces, comme la chapelle, seront réhabilitées en bureaux, bibliothèques, salons ou salles d’exposition, les cheminées seront gardées en décor, portes arrondies et planchers seront remis en état. À la rentrée scolaire 2026, les enfants devraient être accueillis dans 7 classes maternelles et pourront manger sur place à la cantine. « L’école intéresse énormément », poursuit l’élu qui emmène volontiers les visiteurs dans la chapelle et les tours. Durant les vacances et le week-end, le site pourra également servir de cadre aux manifestations culturelles organisées par les communes qui ont adhéré au Sivom.
De notre correspondant régional Jean-Pierre Raynaud
Adapter la charpente à l’existant
Tout en ressemblant à celle d’origine, pour ne pas défigurer le monument, la nouvelle charpente est adaptée à son utilisation future. Les charpentiers ont reconstitué le toit en un mois. « La scierie des Combrailles à Montel-de-Gelat livre le bois, du sapin traité classe 2, débité aux longueurs demandées. Sur place, une équipe de 3 à 5 personnes découpe et prépare les assemblages. » L’autre aile, où un solivage bois avec une dalle collaborante en béton recouvre désormais le sol, sera aussi recouverte d’un toit en ardoise avec 3 lucarnes et des œils-de-bœuf pour faire entrer la lumière. « La difficulté technique est d’adapter la charpente à l’existant car les murs ne sont pas parallèles et les différences de niveaux sont conséquentes. Il faut parvenir à assembler les deux pour un rendu final parfait », explique Xavier, charpentier et chef d’équipe de l’entreprise Maurice Nailler (à Murat). En mai 2024, les compagnons charpentiers passeront le relai aux couvreurs.
Fiche technique
Projet : transformation d’un château en école
Maître d’ouvrage : SIVOM d’intérêt scolaire de la Couze-Pavin et Mairie de Saint-Cirgues-sur-Couze
Maître d’œuvre : ACA Architecte & associés
Entreprise intervenante : Maurice Nailler (charpente-couverture)
Superficie : 1 250 m² de toitures en ardoise
Coût : 2, 22 M€ (en 1re phase)
Calendrier : juin 2023-rentrée 2026