
À Reims, on imprime un immeuble en béton 3D

Seulement deux ans après avoir imprimé les murs en béton de cinq maisons, le bailleur social Plurial Novilia va un cran plus loin (et plus haut) : il va imprimer tout un immeuble d'habitation R+2 au moyen d'un robot géant. L'avenir est en marche.
C’est un projet pionnier en France et en Europe : à Bezannes près de Reims (Marne), le bailleur social Plurial Novilia est en train d’imprimer un immeuble d’habitation en béton. Il n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’avec « ViliaSprint » 1er du nom, plusieurs maisons de plain-pied avaient été construites à partir d’éléments imprimés 3D en atelier. Mais le bond pour « ViliaSprint² » est immense, tant en termes de technologie que de dimensions : l’impression se fait in situ au moyen d’une imprimante géante sur 6 pieds, et la construction montera sur trois niveaux ! Les murs à imprimer (sur plusieurs épaisseurs, 8 cm de façade, 20 cm d'isolant et 16 cm structurels intérieurs) s’étendent ainsi sur 30 mètres de longueur sur 9 mètres de haut et 10 mètres de large. Ce qui fera de ViliaSprint² le plus grand immeuble d’habitation imprimé 3D de toute l’Europe, avec 800 m² habitables pour 12 logements.
Les acteurs du projet, comme le maire de Bezannes et le bailleur social Plurial Novilia (groupe Action Logement) parlent « d’avancée technologique majeure », « d’expérimentation audacieuse », de « rupture avec la construction traditionnelle » et de « vision disruptive ». Pour les promoteurs, le process permet de gagner du temps – 3 mois environ – sur la phase chantier, de diminuer la pénibilité pour les ouvriers et d’économiser de la matière. Ils expliquent qu’il s’agit d’une « forme d’habitat plus intelligente, capable de répondre aux enjeux de demain », en termes d’accessibilité ou de limitation de l’empreinte carbone.

En effet, le grand robot qui supporte la tête d’impression utilise une formulation particulière de béton bas carbone « Tector ECOPact fibré » qui est déjà allégée en carbone par rapport à un béton classique (-30 %). « Les granulats sont locaux, non séchés », ajoute Hélènre Lombois-Burger (directrice R&D Béton chez Lafarge). L’avantage de l’impression 3D est qu’elle permet d’employer moins de matériau qu’une construction classique, générant beaucoup moins de déchets (3 % contre 10 % habituellement). Les architectes expliquent avoir travaillé sur le coefficient de forme avec « moins de façades pour économiser de la matière ». Les balcons extérieurs, rapportés, seront assemblés en bois, amenant du biosourcé dans la construction, pour arriver à une construction très vertueuse (seuils 2025 de la RE2020).

La technologie, exportable, peut se conjuguer avec des réservations pour les armatures dans les zones sismiques, afin de répondre à toutes les contraintes réglementaires. Le procédé n’en finit pas d’évoluer, qu’il s’agisse de machines ou de formulation des bétons d’impression. Restent deux écueils : le défi de la météorologie, qui empêche d’imprimer lorsqu’il pleut trop intensément ou lorsqu’il fait trop chaud (pour des questions de rapidité de prise du béton) et le coût. L’impression 3D est, pour l’heure, 30 % plus chère que la construction classique. Mais les choses vont continuer d’avancer dans un secteur en pleine recherche de productivité. Le recours à une machine similaire, montée sur rails, pourrait même permettre d’imprimer encore plus rapidement des bâtiments à la chaîne, pour – par exemple – reconstruire tout un quartier dévasté par un typhon. Mayotte pourrait même figurer parmi les premiers bénéficiaires.
En 3 mois de moins qu’un chantier classique, un immeuble s’imprime avec 2 ou 3 opérateurs

Fiche technique :
Typologie : immeuble de 12 logements (4x T2, 5x T3, 3x T4)
Surface : 800 m²
Maîtrise d’ouvrage : Plurial Novilia (groupe Action Logement)
Maîtrise d’œuvre : Hobo Architecture
Bureau d’étude structure : Amodis
Bureau de contrôle : Socotec
Entreprise générale : Demathieu Bard Construction
Entreprise impression 3D : Peri 3D Construction (technologie Cobod)
Industriels fournisseurs : Lafarge-Holcim (béton), Schöck (connecteurs synthétiques)
Calendrier : début des travaux d’impression mars 2025, livraison 1er trimestre 2026
Budget : 4,5 M€ pour le bâtiment seul
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