Biogaz, un bel avenir si…

Grégoire Noble
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méthaniseur

La méthanisation est une technologie mature qui se déploie rapidement en France (+40 % de capacités, +60 % de production). Ses cousines – méthanation, gazéification hydrothermale et pyrogazéification – sont également prometteuses. Elles pourraient parvenir à fournir une importante quantité d’énergie renouvelable en 2030 mais à quelques conditions...

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Les perspectives semblent excellentes pour le biogaz qui est lancé sur une « belle dynamique » selon les mots de Jules Nyssen, le président du Syndicat des énergies renouvelables (SER). À la fin de 2022, la France comptait plus de 500 installations en fonctionnement (dont 150 nouvelles) ce qui amène la capacité théorique totale à 9 TWh/an (+41 %). L’an passé, la production s’est elle aussi accrue dans d’importantes proportions, atteignant les 7 TWh (+61 %). Et le « pipeline » de projets est encore plein avec 660 sites représentant une capacité supplémentaire de 16 TWh/an ! « Les gaz renouvelables pourraient représenter 20 % de la consommation nationale dès 2030 », estime le SER. À cette date, la France pourrait compter sur 70 TWh de production sur le territoire. Dans le détail, 50 TWh proviendraient de la classique méthanisation de biodéchets végétaux, et le reste d’autres technologies plus émergentes comme la pyrogazéification (biomasse sèche et ligneuse), la gazéification hydrothermale (biomasse humide, lisier, boues) et la méthanation par électrolyse.

La France se trouve même dans une position de leader en Europe, aux côtés de l’Allemagne et du Royaume-Uni. En tout, le Vieux continent compte 1 200 sites de méthanisation en service pour une capacité de production d’environ 40 TWh de biométhane. La croissance rapide de ces solutions amène l’Union européenne à espérer une production de 350 TWh dès 2030 et de 900 TWh en 2050 ! Car le biogaz est une solution de substitution intelligente aux importations de gaz fossile, plus sûre lors des tensions internationales sur les marchés, flexible puisque le gaz peut se stocker et être distribué par des réseaux existants, et bénéfique pour l’environnement puisqu’il s’agit de valoriser localement des déchets.

Mettre en œuvre les CPB, bénéficier du Fonds de garantie...

Cependant, la mécanique pourrait se gripper : « Les conditions économiques ne sont plus réunies pour permettre l’émergence de nouveaux projets », annonce le SER. La filière pourrait connaître un trou d’air après 2023 avec le tarissement de nouvelles mises en service. Jules Nyssen explique : « Les projets sont stockés en phases amont – entrée en file d’attente ou études – avant que la décision d’investir n’ait été prise ». L’inflation notamment, qui renchérit les matériaux, poserait des soucis à l’équilibre financier des projets. Les acteurs du biométhane disent avoir accueilli favorablement de nouvelles mesures réglementaires en 2022, dont la ré-indexation du tarif d’achat post-Covid et l’augmentation de la validité des contrats de 18 mois, ou encore la mise en œuvre des Certificats de production de biogaz (CPB). Ce dispositif finance la production de biométhane en imposant aux fournisseurs un taux d’incorporation de gaz renouvelable dans les réseaux gaziers. 

« Néanmoins, depuis fin 2020, le nombre de nouveaux projets n’a qu’à peine compensé ceux qui ont été abandonnés dans la file d’attente. Pour relancer la dynamique, les gaz renouvelables ont besoin d’un cadre économique et réglementaire stable et sécurisant sur le long terme », précise le SER. Les opérateurs demandent que les pouvoirs publics aillent encore plus loin en prenant de nouvelles mesures. D’abord, la révision du tarif d’achat du biométhane pour coller au contexte le plus récent. Ensuite la publication du décret d’application des CPB, « en fixant de manière immédiate une trajectoire significative pour les premières années d’entrée en vigueur ». Enfin, en étendant aux gaz renouvelables le Fonds de garantie sur les contentieux existant déjà pour les projets d’EnR électriques. À ces conditions, le biogaz pourra prendre toute sa place dans le mix énergétique français et participer un peu plus à l’indépendance énergétique du pays ainsi qu’à sa décarbonation.

Grégoire Noble
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