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[Chantier] La Basilique de Vezelay retrouve son éclat

Marie Laure Barriera
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Ce qui frappe, en entrant dans la basilique Sainte Marie-Madeleine de Vézelay, c’est la clarté diffusée par les hautes fenêtres, qui se répercute sur la pierre du dallage, des murs et des piliers, et sur l’enduit des voûtes. Malmenées par le temps, l’humidité et les infiltrations, ces voûtes font l’objet d’une réfection, quasiment terminée, puisque le chantier actuel ne concerne plus que celles de l’avant-nef.
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Monument le plus visité de l’Yonne, la basilique bénéficie d’une restauration de grande ampleur depuis les années 2000 : d’abord les toitures, entièrement refaites ; puis, à partir de 2014, la partie orientale : chœur, chevet, transept et deux des tours. La crypte a également été réhabilitée.
La quatrième phase de travaux, débutée en février 2019, concerne la façade occidentale et l’avant-nef, dont les voûtes en berceau totalisent une superficie d’environ 950 m². Le budget alloué aux travaux de l’avant-nef avoisine 400 000 euros.
La chaux aérienne, idéale pour rendre leur éclat aux voûtesDélités, parsemés de tâches, de fissures et d’auréoles, les enduits des voûtes nécessitaient une remise en état de qualité et durable, respectant les techniques antérieurement utilisées. La chaux aérienne Tradical H 98 de BCB a été prescrite par l’agence d’architecture 2BDM pour plusieurs raisons : d’abord, sa capacité à respecter la “perméance” du support permet les échanges de vapeur d’eau et préserve le bâti. Quand le mortier est appliqué, la chaux aérienne, exposée à l’air commence sa prise (carbonatation). Elle se transforme en calcaire et prend alors la même structure que la pierre. La blancheur extrême que lui confère sa pureté répond à la volonté de l’architecte de retrouver la « lumière vivante » si caractéristique au lieu.Ensuite, sa capacité à être modulée et travaillée de manières différentes permet d’obtenir des résistances améliorées mais aussi des nuances et reflets spécifiques. Utilisée ici en pâte, elle a été mise à « gonfler » à l’avance à l’abri de l’oxygène pour obtenir des mortiers plus onctueux et faciles à appliquer.
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Le chantier en “live”Échafaudée en février et mars, l’avant-nef est en travaux depuis avril. Deux chantiers étant menés de front, l’intervention des différents corps de métier est soigneusement phasée.Le diagnostic est un préalable indispensable. « Observer de près les enduits existants nous a permis de comprendre leur constitution et leur mise en œuvre. Dans l’avant-nef, ils datent du XIXe siècle voire du début XXe », note Christophe Wagner, architecte de l’agence 2BDM en charge du programme de travaux initié en 2014.Les mouvements du bâtiment ayant entraîné l’apparition de fissures par endroits, certains moellons des voûtes ont été remaillés : démontés et scellés avec des coulis sulfatés légèrement hydrolysés. Les enduits sont purgés de tout ce qui peut tomber. Environ 30 % de la surface doivent être repris. Pour cela, un dégrossi, pouvant atteindre 5-6 cm d’épaisseur par endroits, est réalisé en 4 passes de 1 à 1,5 cm à la truelle. Le mortier de sable de granulométrie importante (supérieure à 0,4 mm) est chargé de “trasse”, une chaux pouzzolanique qui neutralise les sels minéraux (type sulfates, chlorures et nitrates) en les bloquant dans la maçonnerie. La faible part de prise hydraulique apportera une résistance supplémentaire au gel. Le séchage intervient en 10-15 jours. Un deuxième enduit de chaux aérienne-sable plus fin (0,2 mm) est posé sur environ 5 mm et lissé à la truelle pour tendre les arêtes et leur donner leur forme finale.Après 10 jours intervient la troisième étape, qui consiste en un « polissage, ou polissure, de chaux » : cet enduit au sable très fin (diamètre 0,1 mm) est appliqué sur 2 mm d’épaisseur, en une passe, à la truelle lisseuse. Passé sur l’intégralité de la voûte, il apporte un effet glacé, tendu, qui permet par ailleurs d’uniformiser les parties non restaurées et celles tout juste enduites. Cette fine couche est typique des bâtiments anciens de Bourgogne.La dernière phase est réalisée “a fresco” (quand l’enduit est encore frais) : une patine dite “eau forte”, obtenue par le mélange d’eau de chaux et de pigments naturels, est tamponnée au pinceau brosse et à l’éponge. Elle permet de nuancer la blancheur et d’apporter une certaine irrégularité, un aspect nuageux qui fait vibrer ces grandes voiles claires.
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Un savoir-faire qui fait la différenceUne seule et même décoratrice-restauratrice applique cette dernière touche si importante pour le rendu final sur l’intégralité des voûtes. Elle y travaille depuis 2015, à raison d’une semaine par mois. Outre la finition des enduits, elle masque les ragréages de la pierre à la brosse et à l’éponge, à l’aide d’une palette qui lui est propre, une patine de base colorée de pigments naturels. L’entreprise SNBR a elle aussi ses recettes maison : « Pour retrouver la couleur d’origine des joints, on a exploré les documents du XIXe. Nous avons pu retrouver quelques mètres cubes des sables locaux utilisés à l’époque dans d’anciennes carrières. Parfois, il faut mélanger 5 sables différents pour retrouver la couleur et la granulométrie d’origine ! » poursuit Bernard Théret. SNBR a aussi procédé à des essais pour retrouver la méthode de polissure. Le chantier devrait s’achever au printemps 2020, rendant aux visiteurs la possibilité de parcourir le célèbre « chemin de lumière » qui, depuis la semi-pénombre de l’avant-nef, les mène dans une luminosité croissante, vers le chœur baigné de clarté. (E. Jeanson)

La chaux aérienne, l'alliée du bâti ancien

La chaux aérienne donne toutes leurs qualités de perméance, de compatibilité et de durabilité aux mortiers et enduits. BCB a décliné une gamme 100 % chaux aérienne dédiée aux pros du patrimoine, Tradical Monuments Historiques, dont fait partie la chaux pure éteinte Tradical H 98, d’une finesse et d’une pureté supérieures aux exigences de la norme NF EN 459 des chaux de construction. Base pour préparer et réaliser mortiers de maçonnage et d’enduisage, coulis, badigeon et patine, elle peut s’utiliser pure ou mélangée

Les acteurs du chantier

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La commune de Vézelay, maître d’ouvrage, a choisi l’agence d’architecture 2BDM, dédiée au patrimoine ancien privé ou public, qui regroupe les cabinets de quatre architectes en chef des Monuments Historiques.Huit lots ont été définis : maçonnerie-pierre de taille ; restauration de pierre et décors peints ; charpente-couverture ; menuiserie ; vitraux ; électricité ; cloche et beffroi. Le dernier, suivi archéologique, est assuré par le centre d’études médiévales d’Auxerre, qui apporte une expertise très intéressante.L’entreprise SNBR a remporté l’appel d’offre pour la maçonnerie-pierre de taille. Cette SCOP, agréée Qualibat Restauration Pierre de Taille et Maçonnerie des Monuments Historiques, est basée à Sainte-Savine, dans l’Aube (10). Elle excelle aussi en sculpture.Sylvie Violet, décoratrice-restauratrice, travaille pour le compte de SNBR. Son entreprise, Mezzo Tinto, est située à Villeneuve-la-Guyard, dans l’Yonne (89).

UN PEU D’HISTOIRE

Des moments clés de la vie de la basilique
Visitée chaque année par un million d’amateurs d’histoire et d’art mais aussi de pèlerins, Sainte Marie-Madeleine de Vézelay a pour origine un monastère de moniales bénédictines fondé dans la deuxième moitié du IXe siècle (quelques moines et moniales des Fraternités monastiques de Jérusalem occupent toujours les lieux).Le premier édifice est dévasté en 1120 par un incendie. La nef est reconstruite en style roman, avec une avant-nef, élevée en 1140. Vers 1165-1190, le chœur et le transept sont édifiés en style gothique ; puis, en 1260, la tour Saint-Michel et le fronton de la façade.Merveille d'architecture médiévale religieuse, civile et militaire de Bourgogne, la ville de Vézelay et son principal joyau ont connu des mises à sac, démantèlements, démolitions, vandalisme et méfaits du temps… L’ancienne abbatiale, devenue simple église paroissiale fin XIXe, se dégrade dangereusement, jusqu’à ce que Prosper Mérimée, alors inspecteur des Monuments Historiques s’y intéresse et mandate le jeune Eugène Viollet-Le-Duc pour d’importants travaux de restauration. Achevés en 1859, ceux-ci démontrent le souci de l’architecte de retrouver les sources éléments architecturaux du bâtiment. Viollet-Le-Duc apporte aussi quelques modifications de taille, au prix de choix audacieux.En 1920, l’église devient basilique. En 1979, le site dans son ensemble est inscrit au Patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, relançant un programme de restauration.
Marie Laure Barriera
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