P.Christophe (Synerciel) : "C'est le moment de repenser notre façon de construire"
Président de Synerciel, un réseau regroupant plus de 2000 professionnels du bâtiment autour de métiers orientés sur le confort et la performance énergétique, Philippe Christophe a répondu aux trois questions de Zepros autour de la reprise de l’activité du secteur. Selon lui, les pouvoirs publics doivent favoriser la rénovation énergétique des bâtiments et amorcer un virage vert afin d’aider la mise en route des chantiers.
Quelle est la situation actuelle des membres de Synerciel ?
Philippe Christophe : Aujourd’hui, peu de clients nous demandent des devis. Certes les chantiers ont repris, mais il y a une certaine inertie que ce soit pour trouver de nouveaux clients ou pour trouver des pièces. Les professionnels se posent encore des questions : comment l’activité va reprendre ? Dois-je faire retravailler l’ensemble de mes salariés ? Grâce aux différentes mesures d’hygiènes et de sécurité, il y a une réelle envie de reprendre mais cela va demander du temps et, personnellement, je pense qu’elle n’arrivera pas avant la fin de l’année. Il y a aussi des interrogations autour des plans de relance. Il y a encore trop de questions autour de cette reprise. Pour mon cas personnel, je suis fenêtrier et j’ai de nombreux clients qui ont plus de 60 ans. Je ne sais pas encore s’ils vont pouvoir sortir ou si nous allons pouvoir nous rendre chez eux. Pour accompagner cette reprise, nous avons préparé des actions de communication à travers notre réseau Synerciel. Durant ce confinement, nous nous sommes davantage concentrés sur le digital et nous avons incité nos adhérents à le faire. Mais la principale préoccupation des entreprises, c’est la relance de l’activité.
Comment relancer et accompagner cette reprise ?
P.C : Il faut que les pouvoirs publics montrent des signes de relance notamment au niveau de la politique des économies d’énergies avec une crédit d’impôt fort. Nous attendons de savoir si le secteur du Bâtiment va être compris dans le plan de relance du gouvernement et si la rénovation énergétique va continuer à profiter d’aides. Il faut axer la reprise sur la rénovation énergétique avec notamment une simplification des dossiers administratifs pour que les particuliers comprennent les primes dont ils peuvent bénéficier et favoriser la mise en route des travaux. Pour aider la reprise des chantiers, il faut inciter les particuliers à faire des travaux de rénovation énergétique. Le virage vert est une obligation. Nous avons une chance en cette période difficile, c’est que nous devons reconstruire. C’est le moment de repenser notre économie, notre façon de construire et notre façon de travailler dans le secteur du Bâtiment. Il y a 11 millions d’épaves thermiques en France. Nous devons miser sur l’innovation à travers les solutions créées ces dernières années, sur la proximité pour inciter et accompagner nos clients dans ce virage vert, sur la formation des artisans pour travailler mieux et par conséquence réaliser davantage de chantiers. Nous poussons l’ensemble de nos adhérents à se former que ce soit en ligne ou au sein des centres de formation des industriels.
Y-a-t-il des réticences de la part des particuliers pour accueillir des artisans chez eux ?
P.C : Globalement, très peu d’entre eux, 10 à 20%, refusent de nous recevoir. Au contraire, la plupart était inquiet de ne pas forcément avoir eu de nouvelles durant ce confinement. Nous sommes de petites entreprises et nous ne disposons pas d’un service de communication. L’ensemble des entreprises de notre réseau ont mis en place des rappels clients afin de les tenir informés de la situation et savoir s’ils acceptaient ou non de reprendre leurs travaux. La reprise de ces chantiers permet également de recréer du lien social. Finalement, je ne pense pas qu’il y aura des réticences ou alors très peu. L’inquiétude se situe plutôt autour des particuliers qui avaient des projets de travaux et qui vont les repousser. Les artisans vont avoir moins de devis, c’est une certitude. Il va falloir les accompagner pour maintenanir la tête hors de l'eau car certaines entreprises ont beaucoup souffert durant ce confinement.