Rexel choisi pour tester la livraison “propre” auprès des artisans lyonnais
Avec l’opérateur Lyon Parc Auto (LPA), l’aménageur Lyon Confluence a ouvert mi-avril une plateforme de mobilité douce pour approvisionner les chantiers de l’hypercentre et ceux situés dans trois arrondissements voisins. Avec Swoopin, un opérateur livrant en triporteurs électriques, Rexel expérimente cette solution de logistique urbaine jusqu’à fin mai 2023.
Entre Saône et Rhône, Swoopin mène un test grandeur nature au cœur de l’écoquartier Confluence situé sur la pointe de la Presqu’île. En écho à sa base-line, il donne un nouveau coup de pédale pour « verdir la stratégie logistique » de Rexel France. Depuis bientôt deux mois, tout est mis en œuvre pour assurer les deux missions qui leur sont confiées. Réduire, bien sûr, l’empreinte carbone du “dernier kilomètre” en zone urbaine, mais aussi limiter les nuisances sonores.
L’expérimentation en conditions réelles se déroule dans le nouveau parking du Marché-Gare : l’ex-MIN lyonnais en pleine rénovation. LPA a mis à la disposition des deux sociétés 88 places de stationnement “neutralisées” pour les transformer en « hub de proximité » – sur une capacité totale de 840 pages de parking en souterrain.
Swoopin, déjà habitué à travailler pour des acteurs de l’e-commerce alimentaire entre autres, récupère actuellement les marchandises dans l’agence Rexel de Lyon-Gerland, toute proche de l’écoquartier Confluence, mais également via la plateforme de Saint-Vulbas, dans l’Ain : un site que l’enseigne devrait transférer à la rentrée prochaine à Miribel (Ain), aux portes de Lyon.
« Marre des parcmètres ! Marre des embouteillages et des allers-retours ! […] Adoptez les livraisons en vélo pour le centre de Lyon et les zones à faibles émissions. Nous vous livrons en moins de 2 heures. »
Clément Miasnik, directeur régional AuRA génie climatique chez Rexel (post LinkedIn du 10/06/2022)
Des chantiers livrés « en moins de 2 heures »
Swoopin achemine ensuite les colis par camions roulant au biogaz ou au gaz naturel jusqu’au Marché-Gare. À partir de cette ancienne zone industrielle en pleine mutation urbaine depuis bientôt vingt ans, le prestataire livre les nombreux chantiers de la Presqu’île, ainsi que ceux des IIIe, Ve et VIIe arrondissements voisins.
Pour orchestrer l’approvisionnement des artisans et entreprises du Bâtiment en centre-ville, le prestataire s’appuie sur une quarantaine de vélos-cargos électriques. À l’effigie du “bleu Rexel”, la flotte de triporteurs est conduite par des livreurs en CDI qu’emploie… “Fends la bise”, une PME lyonnaise. De son côté, au sein du parking que gère LPA, Rexel dispose de cinq cellules de consigne d’une capacité totale de 75 m3.
À l’instar de son nouveau format Rexel Express (voir enquête Grand Angle en pages 24-27) qu’il exploite à Paris et en proche banlieue, le distributeur propose deux options* : le retrait des commandes au Marché-Gare ou la livraison au pied des chantiers. Le tout avec un délai annoncé « en moins de deux heures » pour un assortiment d’environ 6 000 références dans un premier temps.
Dans un entretien accordé début mai 2022 au quotidien économique La Tribune, Fabien Bagnon, président de l’opérateur LPA, expliquait que « nous avions besoin de tester en configuration réelle, sur des quartiers, la pertinence de ces moyens de livraison, leur efficacité économique, ainsi que l’aspect pratique ».
* Hormis le retrait dans certaines agences équipées de cassiers 24/24 comme c’est le cas de Rexel Express à Paris.
« L’ambition à long terme du projet LEAD est de concevoir un cadre inspiré de l’Internet physique ouvert pour la logistique urbaine intelligente […] et d’établir les bases du développement de jumeaux numériques urbains à grande échelle. »
Institut de recherche technologique SystemX (communiqué du 20/07/2020)
Des jumeaux numériques face aux défis du “dernier km”
L’expérimentation lyonnaise s’inscrit dans le cadre plus large du projet européen LEAD (Low emission adaptative last-mile logistics through digital twins). Autrement dit, aux côtés de Swoopin, le distributeur de matériel électrique et génie climatique expérimente jusqu’en mai 2023 une livraison “douce” s’adossant sur le concept récent de jumeaux numériques.
Dans une note diffusée en juillet 2020, l’Institut de recherche technologique SystemX (IRT SystemX) – spécialisé dans « l’ingénierie numérique du futur » – rappelait le fil rouge du projet : « Créer les jumeaux numériques [digital twins] des réseaux de logistique urbaine […] en vue de tester et représenter différentes solutions innovantes pour la logistique urbaine » à faibles émissions.
L’objectif de ce test grandeur nature est de répondre aux exigences de l’économie et de la logistique à la demande.
Relativement récent, ce concept d’ingénierie de la supply chain du ”dernier kilomètre” en agglomération sert à reproduire sur le plan numérique un environnement urbain complexe en y intégrant une multitude de paramètres : les différents intervenants de l’amont vers l’aval, les process à chaque étape et leurs interactions.
Depuis quelques années, les “living labs” dédiés à la logistique du “dernier km” ne cessent de monter en puissance avec le déploiement progressif des ZFEm (zones à faibles émissions mobilité).
Valider une logistique urbaine partagée et connectée
Pour le Grand Lyon dirigé par une majorité écologiste, le jumeau numérique ambitionne de mettre sur les rails « une formule innovante » à grande échelle. Le recours à cette technologie assez récente est un maillon supplémentaire du schéma logistique urbain* que la métropole s’est engagée à refondre. En tandem avec LPA et Lyon Confluence (l’aménageur de ce quartier), l’IRT SystemX – l’un des vingt-sept partenaires du consortium LEAD – va collecter les données du pilote Rexel-Swoopin.
Autant d’informations concrètes (flux de livraisons et types de marchandises, poids et volume des colis, distances parcourues de l’amont vers l’aval, etc.) à partir desquelles « le jumeau numérique pourra calculer la valeur d’indicateurs clés en vue d’évaluer et modéliser les impacts logistiques sur l’environnement [quantité d’émissions CO2, décibels, etc.) », précisent les parties prenantes du projet LEAD.
* Dès 2023, la métropole doit lancer le chantier d’un hôtel de logistique urbaine (HLU) sur le port Edouard-Herriot, tout proche de la zone Confluence, en complément de trois espaces de logistique urbaine (ELU).
« Le projet européen LEAD a alloué une subvention de 200 000 € à l’expérimentation de plateforme logistique urbaine menée à Lyon Confluence pour en mesurer les impacts sur le trafic urbain, l’environnement et l’organisation des flux logistique. »
Consortium LEAD, note du 03/07/2020
Reste que la capitale des Gaules ne déploie pas ce “living lab” en solo. Avec cinq autres métropoles européennes (Madrid, La Haye, Budapest, Oslo et Porto), elle inscrit son action dans le cadre du programme de recherche et d’innovation “Horizon 2020” financé par l’Union européenne.
Dans le viseur du projet LEAD ? Il s’agit de « favoriser le développement de plusieurs solutions pour des opérations logistiques partagées, connectées et à faibles émissions, renforcées par une approche de modélisation adaptative et des modèles de jumeaux numériques », rappelle Fabien Bagnon. Et, concrètement, apprécier si l’expérience lyonnaise, entre autres, peut être transférée dans d’autres territoires. Quoi qu’il en soit la logistique urbaine à la demande est devenue un enjeu majeur pour les élus, la distribution, les logisticiens et les citoyens.