Le bloc de pierre ponce, une solution géo-sourcée alternative au béton

L’idée n’est pas récente : les Romains, déjà, utilisaient les qualités des roches volcaniques pour concevoir des édifices qui défieraient le temps. Mais l’usage de pierre ponce a été totalement éclipsé par d’autres matériaux, plus abondants ou plus accessibles. Aujourd’hui, dans un grand mouvement de balancier, avec le retour souhaité à des solutions plus naturelles et durables, comme le bois, la paille ou le pisé, la pierre ponce pourrait faire son grand retour dans la construction. C’est le souhait de la société Cogetherm qui produit des blocs porteurs isolants à partir de ce matériau naturel.

Charlotte Agostini, directrice du développement commercial de Cogebloc, nous explique : « La lave explosive est projetée des volcans directement sous forme de granulats. Il n’y a donc pas besoin de concassage. De nombreuses bulles d’air sont emprisonnées dans le matériau, que nous agglomérons avec un béton sec, de façon à obtenir un équivalent du béton cellulaire, sans cuisson et sans étuvage ». Le liant est ici un CEM II qui ne nécessite que très peu d’eau (trois fois moins qu’un béton standard), contenant du laitier de haut fourneau et des poudres calcaires. Le profil du bloc, lui aussi muni de nombreuses alvéoles, accentue encore les performances acoustiques et thermiques. Empilés, les blocs laissent passer l’air verticalement entre eux et horizontalement, au niveau des joints.

Légère, la matière amène le poids d’un bloc à 17 kg contre 25 kg pour un bloc plein, ce qui facilite la manutention sur chantier. « Les blocs sont utilisables pour tous types de constructions, la maison individuelle, le collectif jusqu’en R+3 s’il est utilisé seul, et au-delà avec mur de refend en béton, mais aussi le tertiaire notamment pour des chais », précise la directrice. Deux classes de résistance mécanique sont disponibles : 4 et 6 MPa. La composition chimique des roches, riches en silices, amène d’autres avantages, comme une résistance au feu (REI 240 minutes), une grande hydrophobicité et une régulation de l’hygrométrie. Le confort d’été est amélioré par un temps de déphasage supérieur à 12 heures. La mise en œuvre se fait de façon classique, mais avec un mortier lui aussi à base de pierres ponces, afin d’apporter une grande homogénéité à la réalisation. Charlotte Agostini assure : « Cogebloc est finalement plus facile à mettre en œuvre. Il y a un plus grand confort à travailler avec un mortier qu’avec une colle et il y a moins de 5 % de chute. Tout est en effet livré en kit, pré-dosé. Une grille de pose sert de gabarit ».

Les blocs ont aujourd’hui 20 ans de retour d’expérience et aucun sinistre n’a été signalé. L’écoquartier du Grand Large à Dunkerque, fief de l’entreprise, a notamment été réalisé au moyen des blocs isolants vers 2008, en R+4 avec combles. La directrice ajoute : « Nous travaillons principalement avec des bailleurs et des promoteurs pour des lotissements ou du collectif. Et très peu avec des constructeurs de maisons individuelles ». Les blocs de pierre ponce s’avèrent utiles avec des matériaux de construction biosourcés notamment, pour apporter de la protection hydrique, de la sécurité incendie ou de la performance thermique. Les produits Cogetherm sont déjà bien référencés chez les distributeurs comme Point.P, Chausson ou Tanguy, et dans presque toute la France, à l’exception du Grand Est, situé trop loin des ports où se fait… l’importation de pierre ponce. Car c’est là la limite de la solution : la ressource naturelle provient de deux carrières, en Grèce (îlot de Gyali en mer Egée) et en Islande, où les réserves sont nombreuses et de qualité. Il faut donc les faire venir par cargo, deux fois par an, avant de les travailler, ce qui grève légèrement l’empreinte carbone du produit.

Le réseau Cogetherm, constitué à ce jour de cinq entreprises indépendantes implantées à Dunkerque, Brest, Chartres, Lyon et Poitiers, devrait prochainement être rejoint par deux nouveaux industriels. Et, loin de se reposer sur leurs lauriers (une autre tradition antique), ces acteurs travaillent à d’autres projets notamment la valorisation de sédiments fluviaux ou portuaires, de scories et de sables de fonderies. Ils ne manqueront décidément pas de ressource(s) !